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Histoire de la médecine en Egypte ancienne
31 mars 2013

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Dernier article complet - mardi 23 avril 2013 :

 

Otracon

Acrobate (Ostacon, Deir el-Medina, XIX-XX dyn., Turin, C7052)

 

Richard-Alain JEAN, « Un peu de physiologie égyptienne (1) : Quelques exemples de cinétique fonctionnelle égyptienne (a), anatomie et dynamique des membres inférieurs », dans Histoire de la médecine en Egypte ancienne, Cherbourg, 23 avril 2013.

 

Modalités de translitération cliquer ici (fiche technique)

 

 

UN PEU DE PHYSIOLOGIE EGYPTIENNE (I) :

QUELQUES EXEMPLES DE CINETIQUE FONCTIONNELLE (a),

ANATOMIE ET DYNAMIQUE DES MEMBRES INFERIEURS

 

Richard-Alain JEAN 

 

 

1. ANATOMIE

  

      Comme en anatomie moderne, les anciens Égyptiens considèrent les quatre segments des membres inférieurs (membrum inferius[1] que sont : la hanche, la cuisse, la jambe et le pied.

      En pratique, le membre inférieur, dans sa totalité, pouvait être désigné par les mots rd [2], wart [3], ou encore xnd [4]. Les langues méditerranéennes actuelles ont gardé cette imprécision. En français courant, le membre inférieur dans son entier peut être désigné par le mot « jambe ». Cette imprécision peut être due à l’étymologie vétérinaire de cette expression. Rappelons en effet qu’un cheval a des jambes. Ce mot provient du bas latin gamba « jarret du cheval, patte », « articulation entre le sabot et la jambe du cheval, paturon » [5]. Les mots gamba et campa proviennent du grec vétérinaire kamphv « articulation de la jambe, jambe » [6]Gamba est retourné au grec moderne avec gavmba. De même en grec moderne, povdi « pied » (datif singulier de l’ancien pouvı, pied d’homme ou d’animal [7]), se confond avec le même mot, povdi, pour «jambe » et aussi « patte ». L’hébreu donne rêgêl « jambe, pied (homme et bête) » [8]. En arabe nous aurons l-qadam « cheville » et qadam « pied ».

      Nous aurons l’occasion d’évoquer d’autres organes, chacun dans leur contexte médical. Aussi, limitons-nous ici aux parties superficielles comme les fesses qui se nomment xpdwy [9], l’anus [10] art (canal anal), ou encore pHwyt en fait la marge de l’anus.

 

      Les articulations :

  

     Entre « l’ossature sacro-iliaque » et le « fémur » se trouve une grande articulation – c’est-à-dire «(l’endroit où) un membre se joint à un autre », avec une autre locution anatomique utilisée en pKahun 3. 1, 8-12, concernant une femme atteinte à l’anus, au petit bassin, et : à wabw [11] n mnty, litt. « la racine des cuisses » (1,9). Elle correspond à la face antérieure de l’articulation coxofémorale, c’est-à-dire à « l’aine »», et très probablement dans ce texte gynécologique, à deux travers de doigt au dessus du pli, dans la région  inguino-abdominale. Nous savons que la cuisse mnt [12] (duel mnty) commence à l’aine. Sa face interne est distinguée par l’expression jnst [13].

    En arrière de l’articulation du « genou » avec la « rotule » se trouve le « le creux poplité » qui est limité latéralement par des tendons importants facilement repérables à la main. Il faut rappeler que les tendons animaux provenant par exemple de la découpe des cuissots servaient d’attaches afin de réunir les pièces de bois des meubles.

     Entre le « tibia » (« le tibia et le péroné ») et les « parties osseuses du pied » se trouve la cheville qui est une « articulation » mettant en relation deux parties distales de deux portions de membres différents (donc au duel « figuré »). Elle devait être désignée par l’expression « articulation du pied ».

 

2. DYNAMIQUE

 

      Les deux appendices du tronc sont destinés à la locomotion dans l’acte physiologique de se déplacer avec les deux jambes, clairement représenté par le signe-mot D54 [14], jw [15] « venir ». Il existait un signe désignant la marche rapide : D286 [16] de valeur sjn, probablement une réduction du signe A27 [17] représentant un homme courant [18] et de valeur jn. Mais déjà confondu avec le signe D54 dès les Textes des Pyramides, le signe D286 disparaît totalement à l’époque classique. Il est remplacé par le signe D54, comme dans sjn [19] « se hâter », mais l’on retrouve le déterminatif A27, dans l’expression sjnw [20] « les messagers rapides ».

  

Image 1

  

      Le hiéroglyphe D54 entre lui-même en composition avec d’autres signes pour donner par exemple : M18 [21], utilisé dans jy [22], « venir » ; W25, utilisé dans jny [23] « amener, emporter » ; O35 [24], utilisé dans zbj [25] « partir, envoyer, apporter, atteindre » ; N40 [26], utilisé dans Sm [27] « aller, marcher, aller à pieds, parcourir (un lieu) » ; T32 [28], utilisé dans sSm [29] « conduire, guider ». Comme déterminatif, il accompagne les verbes nmj [30] « parcourir », nmnm [31], « bouger, se mouvoir » et « aller çà et là » comme avec (*) nmnmn [32]; nms [33] « avancer (n : vers) » ; enfin le verbe nmt [34] « parcourir, se déplacer... », et le substantif (ou encore avec d’autres graphies), nmtt [35] « les pas » entrant dans des locutions comme wstn nmtt « qui a la marche facile », xAx nmt « à la foulée rapide »... En ce qui concerne le même signe inversé : D55 [36], il sert à déterminer le sens inverse avec, par exemple les mots, an [37] « se retourner, contourner », et, Hmj [38] « reculer ».

 

Image 2

 

     La dynamique du mouvement est indiquée par l’expression mnmn [39] « remuer, bouger, déplacer », «(se) déplacer » paisiblement, en utilisant tous ses membres à l’image du troupeau mnmnt [40], ou, mSa [41] « aller, marcher » en utilisant ses deux jambes pour la [42], mSa [43] « marche », à l’image du « voyageur » mSaw [44], ou encore comme la « troupe d’infanterie », mSa [45].

 

      La cinétique articulaire :

 

      Le hiéroglyphe (D56) [46], représente un membre en position fonctionnelle. Il sert de signe-mot dans (Pyr. 18b), « jambe, pied » ou « genou » (P. Ebers 604. 76,21, 605. 77,2), ou, de déterminatif à  rd « pied », mnt «cuisse », wart « jambe », pAd « genou » [47]. Dans xnd « jambe », ce déterminatif fait bien allusion à l’articulation légèrement pliée, et l’on doit ici se reporter l’expression homonyme xnd [48] « courber, plier », très utile pour réaliser des (*) xndwt [49] « foulées », nécessaire au mouvement de xnd [50], « parcourir, fouler », ainsi que pour « gravir » (gr.) xnd [51], un xndw [52] « escalier ». Pour que la cinétique soit efficace, à la flexion doit succéder une extension. À ce propos, G. Lefebvre signale l’emploi du verbe dwn [53] «tendre, étendre », dans la locution dwn.n.j rdwy.j « j’allongeai (je déployai) mes jambes » (pour me relever afin de me mettre en marche) [54]. De même, ce verbe est employé avec le terme mAst (mAsty), pour les membres que l’on doit allonger, déployer pour marcher ou nager [55]. En fait, le muscle est compris comme s’il était tendu comme la corde d’un arc [56]. Le corps de l’arc est d’autant plus courbe que la corde est tendue. La solution de continuité que représente l’articulation organise une flexion entre deux segments.

  

Image 4

  

      Pour les définitions anatomiques et physiologiques précises des métou muscles, tendons ou nerfs et leurs interactions, voir : Richard-Alain JEAN, « Médecine et chirurgie dans l’ancienne Égypte », dans Pharaon Magazine, 11, 2013, p. 47-49.

  

Image 6

 


[1] R.-A. Jean, A.-M. Loyrette, « À propos des textes médicaux des Papyrus du Ramesseum nos III et IV, II : la gynécologie (1) », dansS.H. Aufrère (éd.), Encyclopédie religieuse de l’Univers végétal (ERUV III), OrMonsp XV, Montpellier, 2005, p. 353-358 (avec aujourd’hui une rectification de la figure 3).

[2] Wb II, 461,1 - 462,15 ; Alex. 77.2448, 78.2456 « pied, jambe », 79.1801 (aHA Hr rdwj « combattant à pied, fantassin » ; Xr rdwj « sous les pieds » ; rnp rdwj « aux jambes vigoureuses » ; rdwj « les jambes ») ; Erichsen 1954, 258 : démotique rt « pied » ; KoptHWb, 167 ; Vycichl 1983, p. 178 : rat= (SB) aussi rEt= (S°), ret=, reet= (A), « pied, jambe », « sol, territoire », « trace ». Sander Trenel 1979, p. 672 : hébreu râdâh (« fouler » ; « dominer, assujettir, tyraniser »). Arabe radâ « fouler le sol des sabots (cheval) ». Voir aussi le démotique rm(t) rt-wy≠f « fantassin » : Érichsen 1954, 247, et, le copte rm(n)ratoy (S), remnratoy (B) « fantassin » : Vycichl 1983, p.178. Lefebvre 1952, § 55, p. 48-49. Lacau 1970, § 341-348, p.129-132. Walker 1996, p. 271, « 1) lower leg including foot ; 2) foot ».

[3] Wb I, 287, 4-7. Alex. 77.0873 « jambe », 78.0906 « le giron » de la mère ». KoptHWb, 276, oyerEte (S). Vycichl 1983, p. 237 : oyrIte (L) oyrEte (SAL) oyerET (F), « pied, jambe ». Ces formes viennent du duel war.t-y. Arabe rijilregelregl-o, « pied ». Voir aussi war : Wb I, 286, 8-20. Alex. 77.0872 « s’éloigner, fuir », 78.0905 « parcourir rapidement », 79. 0635 « prendre la fuite », c’est-à-dire « à toutes jambes ». Lefebvre 1952, § 59-60, p. 52-54. Lacau 1970, § 349, p.132. Walker 1996p. 271, « 1) hip joint ; 2) whole leg hip joint downwards ».

[4] Wb III, 313, 22-23. Alex. 78.3086 (« jambe »). Lefebvre 1952, § 62, p. 55. Lacau 1970, § 358361, p.134. Walker1996p. 273-274, « 1) shank, lower leg including the knee but excluding the foot ».

[5] Benoist, Goelzer, Traduction latine du traité de Pelagonie sur l’art du vétérinaire, (Ve siècle ap. J.-C.), Garnier frères, Paris, 1906, p. 624.

[6] P. Chantraine, Dictionnaire étymologique de la langue grecque, Histoire des mots, Klincksieck, Paris, 1977, tome I, p. 490-491.

[7] M.A. Bailly, Dictionnaire Grec-Français, Hachette, Paris, 1899, p. 1614. P. Chantraine, Dictionnaire étymologique de la langue grecque, Histoire des mots, Klincksieck, Paris, 1977, tome III, p. 932-933.

[8] Sander, Trenel 1979, p. 670 & p. 359. Notons qu’en hébreu biblique, le mot rêgêl, « pied », peut être employé pour désigner pudiquement les organes génitaux : voir par exemple l’expression « poil des pieds » en Isaïe 7,20 (voir aussi : Is. 6,2, Ex. 4,25, et, l’expression « eau des pieds » pour « urine » en Is 36,12). M.M. Cohn, Nouveau dictionnaire hébreu-français, Larousse, Paris, p. 636.

[9] Wb III, 270,14 - 271,3 ; Lefebvre 1952, § 32 ; Lacau 1970, § 202-203 ; Alex. 77.3058 xpd « les fesses ».

[10] Walker 1996, p. 221-250. Pour nous : pHwyt « anus », avec « sur » = « à la marge de l’anus », et pHwyt avec « dans » = « rectum », et selon la clinique (cf. Jean, Loyrette op. cit. 2005, parties cliniques).

[11] Wb I, 251,1. Lefebvre1952, § 17, p. 17, § 20, p. 20, § 54, p. 48. CD, 53. GHWb, 172. Walker 1996p. 267, « root socket of the thigh, hip joint ».

[12] Wb II, 68, 7-15. Lefebvre 1952, § 54. Lacau 1970, § 336-338.

[13] Lacau 1970, § 339.

[14] Cat. IFAO 1983, 118,5. InvHierInf., 1988, p. 97, D54. ValPhon., 1988, p. 199, 1025. Jean 1988. Meeks 1994, p. 10. Dendara. p. 61, D54. Hieroglyphica, D54. P. Lacau, Sur le système hiéroglyphique, IFAO, Le Caire, 1954, p. 19.

[15] Wb I, 44,1 - 45,6 ; Alex. 77.0174, 78.0198 « venir », 79.0114 (« livrer »; jw n « venir à (quelqu’un) » ...) ; KoptHWb, 484, aioy (B). W. Voir aussi : Vycichl 1983, p. 138.

[16] Cat. IFAO 1983, 118,8. InvHierInf., 1988, p. 97, D286. Meeks 1994, p. 10. Hieroglyphica, D286.

[17] Cat. IFAO 1983, 5,7. InvHierInf., 1988, p. 54, A27. ValPhon., 1988, p. 8, 117-118. Meeks 1994, p. 2.

[18] Lacau1954, p. 19.

[19] Wb IV, 38,9 - 39,9 ; Alex. 77.3390, 78.3335 « se hâter ».

[20] Wb IV, 39, 11-12 ; Alex. 77.3392 « les messagers rapides ».

[21] Cat. IFAO 1983, 248,14. InvHierInf., 1988, p. 142, M18. Meeks 1994, p. 10.

[22] Wb I, 37,1-36,18 ; Alex, 77.0151 (« venir  »; jy n « venir à, vers »; jy Hr « aller vers, à » ...), 79.009 « arriver » ; KoptHWb, 47 ; Vycichl 1983, p. 59 : ei (S), i (B), « venir ».

[23] Wb I, 90,1 - 91,10 ; Alex. 77.0317, 78.0344 « amener, emporter », 79.0241 « atteindre (un endroit)» ; KoptHWb, 50, voir aussi : 7, 8, 236, 235, 237 ; Vycichl1983, p. 64 : eine (S), ini (B), nt- (S), en- (B); nt= (S), en= (B).

[24] Cat. IFAO 1983, 318,1-2 ; InvHierInf., 1988, p. 162, 035 ; Meeks 1994, p. 10.

[25] Wb III, 429,10 - 431,28 ; Alex. 77.3474 « partir, envoyer », 78.3416 « apporter »; « atteindre ».

[26] Cat. IFAO 1983, 279,1 ; InvHierInf., 1988, p. 152, N40 ; Meeks 1994, p. 10.

[27] Wb IV, 462,7 -465,18 ; Alex, 77.4170 « aller, marcher, aller à pieds », 78.4108 « parcourir (un lieu) », 79.2995 ; KoptHWb, 301 ; Vycichl 1983, p. 254 : çe (SBAL), çE (FMO) çeI (S) « aller ».

[28] Cat. IFAO 1983, 429,16 ; InvHierInf., 1988, p. 190, T32 ; Meeks 1994, p. 10.

[29] Wb IV, 285,7 - 287,20 ; Alex. 77.3873, 78.3829, 79.2776 « conduire, guider », « sSm wAt montrer le chemin ».

[30] Wb II, 265, 5-13 ; Alex. 77.2105 « marcher, voyager », 78.2106 « parcourir », « transporter (quelqu’un) », 79.1550 « traverser ».

[31] Wb II, 267, 11-14 ; Alex. 77.2110 « bouger, trembler se mouvoir », 78.2113 « aller çà et là ».

[32] Alex. 78.2114  (*) « aller çà et là ».

[33] Wb II, 269,11 ; Alex. 78.2120 « avancer (n : vers) ».

[34] Wb II, 270, 4-21 ; Alex. 78.2122 « parcourir, se déplacer », « se diriger (r : vers) », «  se rendre (m : à) », « monter (un escalier) », 79.1560 « venir ».

[35] Wb II, 271, 1-18 ; Alex. 77.2118, « les pas », 78.2123 « l’avance », « la course (du soleil) », 79.1561 « la marche ». À comparer avec le copte. KoptHWb 123 ; Vycichl 1983, p. 143 : nomte (S), nomT (B), « force »; « armée ».

[36] Cat. IFAO 1983, 118,6. InvHierInf., 1988, p. 97, D55. ValPhon., 1988, p. 200, 1027. Meeks 1994, p. 10. Dendara. p. 65, D55.

[37] Wb I, 188,13 - 189,7 ; Alex. 77.0651, 78.0721 « se retourner, contourner », 79.0480 (dans : n an.n.f sw « il ne revient pas en arrière »).

[38] Wb III, 79, 1-21 ; Alex. 78.2671 « écarter, éloigner », 79.1956 « revenir vers » ; Grandet-Mathieu 1997, p. 563, rem. 4 « reculer ».

[39] Wb II, 80,15 - 81,15 ; Alex. 77.1730 « remuer, bouger, déplacer », 78.1735 « (se) déplacer », 79.1222 Mnmn n rn.k « tressaillir à ton nom » ; KoptHWb, 95 ; Vycichl 1983, p. 116 : monnen (B) « mouvoir, ébranler ».

[40] Wb II, 81, 17-23 ; Alex. 77.1731, 78.1736, 79.1223 « troupeau ».

[41] Wb II, 156, 4-12 ; Alex. 77.1889 « aller, marcher », 79.1373 « se déplacer » ; Érichsen 1954, 181 : démotique mSa, « aller » ; KoptHWb 108 ; Vycichl 1983, p. 128 : mooçe (S), moçi (B), maahe (AL), maaçi (F), mohe (P), « marcher », « s’en aller ».

[42] WbBele., 2/1, 232.

[43] Wb II, 156,12 ; Alex. 79.1374 « marche, voyage ».

[44] Wb II, 156,13 ; Alex. 78.1875 « le voyageur », 79.1375 « les voyageurs ».

[45] Wb II, 155, 2-19 ; Alex. 77.1888, 78.1874  « la troupe, la compagnie », 79.1372 « la foule, la troupe (des fidèles, des ouvriers) », « corps d’armée », « infanterie » ; Érichsen 1954, 181 : démotique mSa, « peuple, foule, armée » ; KoptHWb, 108 ; Vycichl 1983, p. 128 : mEEçe (S), mEç (B), « multitude », « foule », « troupe » ; voir aussi mooçe, p. 129 (fin de notice).

[46] Cat. IFAO 1983, 119,5. InvHierInf., 1988, p. 97, D56. ValPhon., 1988, p. 204, 1129-1131. Jean 1988. Meeks 1994, p. 10. Dendara. p. 62, D56.

[47] Lacau 1954, p. 24.

[48] Wb III, 312,15 ; Alex. 77.3133, 78.3084 « courber, plier ».

[49] Alex. 77.3136 (*) « foulées ».

[50] Wb III, 312,16 - 313,20 ; Alex. 77.3135, 78.3085, 79.2248 « parcourir, fouler ». Comparer au copte hwnt KoptHWb, 380 ; Vycichl 1983, p. 306 : hwnt (S), uwnt (B), hnt- (S), uent- (B), hont= (S), uont= (B), « s’approcher ».

[51] Wb III, 312,16 - 313,20 ; Alex. 77.3135 « parcourir, fouler », 78.3085 « gravir (un escalier) ».

[52] Wb III, 314, 4-15 ; Alex. 77.3138 « trône, escalier, rampe », 78.3090, 79.2250 « siège ».

[53] Wb V, 431,1 - 432,13 ; Alex. 77.5008 « tendre, étendre », 78.4762 (dwn a « tendre le bras » pour protéger, pour offrir) ; Érichsen 1954, 614 : démotique twn « se lever » ; KoptHWb, 254 ; Vycichl 1983, p. 224 : twoyn (SB) twwn (S) twn (B), « se lever ».

[54] Le conte du naufragé, 45-46a : Papyrus Ermitage 1115. Blackman, Middle-Egyptian StoriesBiblAeg II, Bruxelles, 1933, p. 41-48. Le Guilloux, Le conte du naufragé, Cahier de l’Association angevine d’Égyptologie Isis, 1, Angers, 1996, p. 30-31.

[55] WbBele. 2/1,p. 48, 32,6. Lefebvre 1952, § 59, p. 52.

[56] On renverra à S. Wiebach-Koepke, ÄAT 55/1-2, München, 2005.

 


 

Article original complet - dimanche 31 mars 2013

 

EGYPTOLOGIE 

 

Point « d’histoire de la médecine » possible sans les études des cultures correspondantes, de leurs idiomes et de leurs contextes. Cette rubrique sera donc consacrée à l’égyptologie. Elle a pour but de favoriser l’accès à tous de cette science, surtout à partir de ses composantes les plus utiles à la compréhension de la naissance de la pensée médicale en égypte, puis, dans le Moyen Orient.

Aussi, nous aborderons d’abord quelques portraits de personnages célèbres sans les travaux desquels nous serions bien incapables aujourd’hui d’avancer le moindre argument sérieux dans nos recherches. Nous créerons également une sorte de « trousse à instruments historiques » destinée à faciliter la lecture des faits et de leurs interprétations médicales quand celles-ci seront possibles. Bien entendu, un « vocabulaire » sera petit à petit développé pour former un lexique à plusieurs entrées. Des textes historiques, religieux, scientifiques et médicaux seront progressivement présentés à titre d’exemples. Les apparats critiques proposés à chaque fois que cela semblera nécessaire seront toujours accompagnés des définitions en langage clair. Viendront ensuite, en appuis, plusieurs sections iconographiques commentées multidisciplinaires. Certaines de ces données pourront être originales et offrir, déjà, des résultats d’investigations en cours.

De plus, tous les éléments imprimables dans un format acceptant les hiéroglyphes et les tableaux prendront place dans une publication intitulée les « Cahiers Intégrés de Médecine Egyptienne » (CIME) regroupant de façon thématique et souple un maximum d’arguments égyptologiques et techniques, et ceci, de façon accessible aux cliniciens et aux enseignants.

Voici pour inaugurer cette partie, quelques portraits d’égyptologues fondateurs rédigés par Xavier Riaud, et au premier rang desquels, l’illustre Jean-François Champollion, le déchiffreur de hiéroglyphes.

 

Richard-Alain JEAN

 

PORTRAITS HISTORIQUES

 

Jean-Francois_Champollion_2

 Jean-François Champollion (1790-1832)

 toile réalisée en 1831 par Léon Cogniet (Paris, Musée du Louvre, n° inv. 3294).

 

Xavier RIAUD, "Jean-François Champollion", dans Histoire de la médecine en Egypte ancienne, Cherbourg, 2 avril 2013.

 

Jean-François Champollion

 

Xavier RIAUD

 

 Champollion le Jeune naît le 23 décembre 1790, à Figeac, dans le Lot. La Révolution y bat son plein. Il est baptisé aussitôt né. A 5 ans, Jean-François sait déjà lire. Il est élevé par son grand frère qui part bientôt à Grenoble. Le petit garçon entre à l’école en novembre de cette année-là. Il connaît de sérieuses difficultés en orthographe et en mathématiques. De plus, son mauvais caractère le dessert terriblement. Un précepteur, l’abbé Calmels, lui enseigne des rudiments de latin, de grec et d’histoire naturelle, et, malgré la distance, son frère se soucie énormément de lui[1].

Il quitte Figeac à la fin mars 1801 et rejoint son frère à Grenoble, le 27 mars 1801. Jacques-Joseph prend alors son éducation à sa charge. Dépassé par la tâche, ce dernier remet Jean-François à l’abbé Dussert, enseignant renommé dans cette ville. Il reçoit ses connaissances de novembre 1802 à l’été 1804. Il peaufine son savoir en latin et en grec, et lui fait découvrir l’hébreu, l’arabe, le syriaque et le chaldéen. Passionné, l’adolescent brille dans l’étude de ces langues. En mars 1804, il obtient une bourse qui lui permet d’intégrer le lycée impérial de Grenoble, dont il suit les cours jusqu’en août 1807. Il y est très malheureux, car il se plie mal à la discipline militaire du lycée. En 1807, n’y tenant plus, il quitte l’institution. Il y apprend les langues anciennes pour lesquelles il se passionne[2]. Il aurait rencontré Dom Raphaël de Monachis, moine grec proche de Bonaparte qui a participé à l’expédition d’Egypte. Celui-ci lui aurait démontré que le copte viendrait de l’égyptien ancien. Acharné au travail, il publie le 1er septembre 1807, un Essai de description géographique de l’Egypte avant la conquête de Cambyse qu’il présente à l’Académie des sciences et des arts de Grenoble. Le succès est au rendez-vous et il devient membre correspondant de cette institution. Profondément interpellé, Champollion décide de ne plus se consacrer qu’aux hiéroglyphes. Il quitte Grenoble pour la capitale qui lui offre des perspectives plus intéressantes. Il y arrive le 13 septembre 1807. Après avoir obtenu une petite bourse, il suit les cours de langues orientales au Collège de France et à l’Ecole des langues orientales. Assidu au labeur, il fréquente la Bibliothèque impériale où il se lie d’amitié avec le conservateur du cabinet des antiques, Aubin-Louis Millin. Il remplace, lors de ses absences, Prosper Audran, dont il assure les cours au Collège de France. Grâce à Dom Raphaël de Monachis, il rencontre un prêtre égyptien qui lui apprend le copte[3].

En 1808, il apprend que les hiéroglyphes ont été déchiffrés par Alexandre Lenoir (1761-1839), célèbre archéologue et collectionneur qui a sauvé, des méfaits de la Révolution, de nombreux trésors nationaux, qui vient de publier ses résultats. Vexé, Champollion décide de ne plus se consacrer qu’à la traduction de ces symboles. Il étudie tout d’abord des papyrus en écritures cursives. En 1808, il comprend le principe de ligatures des signes[4].

Au début de l’année 1809, il rédige une grammaire copte et se penche sur le texte démotique de la pierre de Rosette. Il fait table rase de tous les préceptes connus concernant les hiéroglyphes et n’hésite pas à vilipender les autres chercheurs[5].

En juillet 1809, il est nommé professeur-adjoint d’histoire à l’université de Grenoble, grâce à l’intervention du Grand Maître de l’Université impériale, Jean-Pierre Louis de Fontanes. Dans le même temps, son frère est nommé professeur de grec et bibliothécaire-adjoint de la même ville. Le 15 octobre 1809, Champollion entre dans ses nouvelles fonctions officiellement. En 1810, c’est la consécration pour les deux frères qui reçoivent le titre de docteur ès lettres par décret impérial, ce qui correspond au rang de professeur. Le 30 mai 1810, Champollion fait son discours inaugural, prélude à son enseignement. En parallèle, il poursuit ses recherches. 

Dans une communication, le 7 août 1810, à l’Académie delphinale, dont le titre est L’écriture des Egyptiens, il démontre que le démotique est une simplification des hiéroglyphes, comprenant 25 lettres alphabétiques, et que ces mêmes hiéroglyphes constituent une écriture de syllabes ou d’idées[6].

En 1812, il est convaincu d’une chronologie dans les écritures. Il comprend aussi que les vases canopes sont des éléments funéraires contenant des viscères, que les ornements figurant dessus sont liés au jugement des âmes[7].

La première Restauration arrive et rien ne change pour les deux frères. Jean-François publie son Essai sous les pharaons en août 1814 qu’il dédie à Louis XVIII. Au retour de l’Empereur, Napoléon, séduit par les frères Champollion, engage Jacques Joseph comme secrétaire. Grâce à cela, Jean-François fait paraître son Dictionnaire de la langue copte aux frais de l’Etat. Jacques-Joseph accompagne l’Empereur à Paris. Là, il est décoré de la Légion d’honneur. Dans un article en date du 18 juin 1815 paru dans les Annales de l’Isère, Jean-François soutient ouvertement Napoléon[8]. Après la défaite de Waterloo et l’abdication de ce dernier, son dictionnaire est refusé par l’Académie le 17 juillet 1815. Il est ensuite démis de ses fonctions et placé sous surveillance à compter du 28 juillet 1815. La pression étant très forte compte tenu de leur opinion bonapartiste, les deux frères doivent s’exiler à Figeac à partir de mars 1816. Ils y parviennent le 2 avril. Très vite, ils s’y ennuient. Leur père, sous l’emprise de l’alcool, s’est endetté. Jacques-Joseph s’intègre dans la haute société de Figeac où il dispense ses bons mots. Il soutient Jean-François qui est destitué de sa fonction de bibliothécaire. En novembre, Jacques-Joseph est rappelé à Grenoble, ce que Jean-François ne peut faire qu’à partir de janvier 1817. En avril, l’aîné des deux frères part pour Paris. Il reste malgré tout à Figeac pour régler les dettes de son père. Il fait venir son matériel de transcription et poursuit l’écriture de son dictionnaire copte. Le 21 octobre 1817, le jeune homme revient à Grenoble où son retour est fêté. Il y implante, ce qu’il avait fait au préalable à Figeac, une école d’enseignement mutuel, où les grands enseignent aux petits.

Le 18 juin 1818, il réintègre sa fonction de bibliothécaire. En 1819, après avoir longuement étudié les papyri du livre des morts, il est convaincu que les hiératiques sont une simplification des hiéroglyphes. Le 20 mars 1821, il participe à une insurrection et s’en sort in extremis grâce à ses amis. Destitué de ses fonctions de bibliothécaire, il quitte Grenoble le 11 juillet 1821[9].

Cette année-là, il déchiffre ses premiers cartouches royaux : Cléopâtre sur la base d’un obélisque et Ptolémée sur la pierre de Rosette. A partir de détails issus de reproductions des temples d’Abou Simbel, il réussit à lire le cartouche de Ramsès, puis, en 1822, celui de Thoutmosis. En 1822 toujours, il démontre, à l’instar des chercheurs de l’époque, que le zodiaque de Dendérah ne remonte pas au Nouvel Empire et qu’il n’est pas antérieur au déluge décrit par la Bible. Il est chaleureusement remercié par le Pape qui lui offre un cardinalat que Champollion refuse. Le Pape sollicite alors le roi de France pour que lui soit attribué la Légion d’honneur[10].

En 1824, il publie, aux frais de l'Etat, un livre intitulé Précis du système hiéroglyphique des anciens Égyptiens. L’égyptologie était embryonnaire, elle devient scientifique. Cependant, ses trouvailles suscitent diverses polémiques. Sur la recommandation du Prince d’Orléans, il est missionné pour assurer l’inventaire d’une collection égyptienne appartenant au roi, entreposée à Turin. En 1826, il est nommé conservateur de la collection égyptienne du musée du Louvre. A ce poste, il décide Charles X à acheter plusieurs collections égyptiennes qui viennent grossir celles exposées au musée. C’est lui encore qui fait l’acquisition de l’obélisque du Louxor en 1834, qui sera dressé sur la place de la Concorde en 1836, après avoir été un temps sur le quai cours la Reine (futur cours Albert Ier[11].

De 1828 à 1830, il part enfin pour cette Egypte qu’il ne connaît pas et dont il rêve tous les jours. Accompagné de son collaborateur et ami, Ippolito Rosellini, il effectue un travail de collecte d’objets monumentale, ceci afin de contrôler que son système hiéroglyphique est bien adapté[12].

Lorsqu’il rentre au pays à la fin de l’année 1829, il est aussitôt mis en quarantaine. Il est malade et son séjour dans un établissement d’isolement qui se révèle très humide ne fait qu’aggraver son état. Après le départ de Charles X, il est élu à l’Académie des inscriptions et belles-lettres. Il est nommé aussi à une chaire d’Antiquité égyptienne au Collège de France. Son premier cours, qui est un événement, est donné en 1831. Quelques mois plus tard, le 4 mars 1832, il meurt à Paris. Atteint de goutte, de tuberculose et d’une vraisemblable bilharziose contractée en Egypte, il s’est considérablement affaibli. Il est enterré au cimetière du Père-Lachaise. Il a alors 41 ans. Il est considéré comme le père de l’égyptologie[13].

A son décès, les hommages pleuvent et son nom est donné à de nombreux lycées et collèges. De même, à un cratère lunaire.

Il a publié :

L'Égypte sous les Pharaons, 1814 ; Lettre à M. Dacier relative à l’alphabet des hiéroglyphes phonétiques, 1822 ; Panthéon égyptien, collection des personnages mythologiques de l'ancienne Égypte, d'après les monuments, 1823 ; Précis du système hiéroglyphique des anciens Égyptiens, 1824 ; Lettres à M. le Duc de Blacas d'Aulps, 1826 ; Notice descriptive des monuments égyptiens du musée Charles X, 1827 ; Précis du système hiéroglyphique des anciens Égyptiens ou Recherches sur les éléments premiers de cette écriture sacrée, sur leurs diverses combinaisons, et sur les rapports de ce système avec les autres méthodes graphiques égyptiennes, 1828 ; Lettres écrites d'Égypte et de Nubie, 1828 ; Grammaire égyptienne, 1836 et Dictionnaire égyptien en écriture hiéroglyphique, 1841[14].

Notes :

[1] Cf. Jacq Christian, Champollion l'Égyptien, Du Rocher (éd.), Monaco, 1987.

[2] Cf. Lacouture Jean, Champollion, Une vie de lumières, Grasset (éd.), Paris, 1988.

[3] Cf. Jacq Christian, 1987.

[4] Cf. Lacouture Jean, 1988.

[5] Cf. Faure Alain, Champollion, le savant déchiffré, Fayard, 2004.

[6] Cf. Jacq Christian, 1987.

[7] Cf. Lacouture Jean, 1988.

[8] Cf. Faure Alain, 2004.

[9] Cf. Jacq Christian, 1987.

[10] Cf. Lacouture Jean, 1988.

[11] Cf. Faure Alain, 2004.

[12] Cf. Lacouture Jean, 1988.

[13] Cf. Jacq Christian, 1987.

[14] Cf. Faure Alain, 2004.

 

Trousse à instruments historiques :

(Xavier RIAUD et Richard-Alain JEAN)

(partie en cours de construction)

1) Bibliographie complémentaire

2) Extraits d'ouvrages

3) Muséologie : La « Pierre de Rosette »

  

Bibliographie complémentaire

 

Pour plus de détails, se reporter également à : Hermine HARTLEBEN, Champollion. Sa vie son œuvre, 1790-1832, Paris, 1983.

 

 Extrait de : Jean-François Champollion (1822)

 Lettre à M. Dacier relative à l’alphabet des hiéroglyphes phonétiques.

 

pl 1-2 -Jean-François_Champollion_-_Lettre_à_M

Jean-François Champollion, 

Lettre à M. Dacier relative à l’alphabet des hiéroglyphes phonétiques,

 1822, p. 45-47 et pl. I.

 

Planche Ire.

 

Noms en écriture démotique.

 

INSCRIPTION DE ROSETTE.

 

1. ΔΛΚΣANTPΣ (Alexandre).

2. ΠTΛOMHΣ (Ptolémée).

3. APΣHNE (Arsinoé).

4. BRNHKE (Bérénice).

5. AHETOΣ (Aétès).

6. ΠRE (Pyrrha).

7. ΠHΛHNΣ (Philinus).

8. ARHE (Aréia).

9. THEKNΣ (Diogène).

10. TIRENE (Irène).

11. ΣNTKΣΣ (Συνταξις).

12. OYHNN (Ionien, Grec).

 

PAPYRUS DEMOTIQUE.

 

13. AΛΚΣNTPOΣ (Alexandre).

14. ΠTΛOMHΣ (Ptolémée).

15. ARΣHN (Arsinoé).

16. BRNHK (Bérénice).

17. KΔOΠTR (Cléopâtre).

18. AΠLONHΣ (Apollonius).

19. ANTHΧOΣ (Antiochus).

20. ANTHKNΣ (Antigone).

 

Noms et signes hiéroglyphiques.

 

21. Signe idéographique du genre féminin.

22. ΠTΛOMHΣ (Ptolémée) toujours vivant, chéri de Phtha. (Inscription de Rosette).

23. ΠTΛOMHΣ (Ptolémée) toujours vivant, chéri de Phtha. (Obélisque de Philæ).

23 bis. ΠTΛOMHΣ (Ptolémée), toujours vivant, chéri d’Isis.

24. KΛEOΠATRA (Cléopâtre). Ce nom est suivi des signes idéographiques du genre féminin ; voyez n° 21. Obélisque de Philæ.

25. AΛΚΣANTPΣ (Alexandre le grand). Édifices de Karnac.

26. AΛΚΣNPΣ (Alexandre le grand). Karnac. La lettre T manque entre le N et le P ; cette omission peut venir du sculpteur égyptien même.

27. Caractère hiératique répondant au Σ démotique et hiéroglyphique.

28. ΠTOΛMHΣ (Ptolémée) ; tiré du texte hiéroglyphique de l'inscription de Rosette.

29. ΠTOΛMHΣ (Ptolémée), à Dendéra.

30. ΠTOΛMHΣ (Ptolémée), monolithe de Qous. (Apollinopolis parva.)

31. ΠTOΛMHΣ (Ptolémée). Le M est exprimé par le nycticorax, espèce de chouette appelée Mouladj en langue égyptienne.

32. BRNHKΣ (Bérénice), suivi des marques idéographiques du genre féminin.

33. BRNHKΣ (Bérénice), gravé comme le précédent, sur la porte triomphale du sud, à Karnac.

34. KΛAΠTRA (Cléopâtre), avec les signes du féminin (voy. n° 21).

35. KΛAOΠTRA (Cléopâtre), avec les mêmes signes.

36. KΛAOΠTRA (Cléopâtre), avec les mêmes signes.

37. KΛOΠTRA (Cléopâtre). Ce nom est suivi des signes du genre féminin et du titre idéographique Déesse, avec une qualification dont les signes sont incomplets.

38 et 39. Groupe hiéroglyphique répondant au mot grec et signifiant aussi surnommé : il est placé constamment entre les noms et les surnoms des rois Lagides. Voyez les nos 40, 41 et 42.

40. ΠTOΛMHΣ (Ptolémée) surnommé ARKΣNTRΣ (Alexandre) toujours vivant chéri de Phtha.

41. ΠTOΛMHΣ (Ptolémée) qui est surnommé ARKSNTRΣ (Alexandre), toujours vivant, chéri de Phtha.

42. ΠTOΛMHΣ (Ptolémée) surnommé NHOKHΣRΣ (nouveau César), toujours vivant, chéri d'Isis. Il faut observer que les deux plumes ou feuilles du surnom et qui expriment le son H, sont placées de manière à être prononcées à la fois et après le N et après le K ; on trouvera d'autres exemples de cette disposition de signes particuliers aux systèmes hiéroglyphiques soit phonétique, soit idéographique. (Voyez n° 71.)

43. ΠTOΛMHΣ-KHΣΛΣ (Ptolémée-César), à Dendéra.

 

 La « Pierre de Rosette »

 

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 Pierre de Rosette (Londres, British Museum, n° inv. EA 24)

cliquer sur le cliché pour zoomer

 

 Pour la « Pierre de Rosette », se reporter à :

 

C. ANDREWS, The Rosetta Stone, The British Museum Press, Londres, 1982.

C. ANDREWS, St. QUIRKE, The Rosetta Stone – Facsimile drawing, with an Introduction and Translations, The British Museum Press, Londres, 1988.

R.S. SIMPSON, Demotic grammar in the Ptolemaic Sacerdotal Decrees, Griffith Institute, Ashmolean Museum, Oxford, 1996.

R. PARKINSON, Cracking codes: the Rosetta Stone and decipherment, The British Museum Press, Londres, 1999.

R. PARKINSON, The Rosetta Stone, The British Museum Press, Londres, 2005.

 


 

Article complet du lundi 25 mars 2013 :

Série "Mises au point"

pluvier d'Egypte

Crocodile et pluvier d’Égypte

(Dessin J. M. Cook, 1876 - Popular Natural History)

 

Richard-Alain JEAN, "La sangsue en Egypte ancienne"dans Histoire de la médecine en Egypte ancienne, Cherbourg, 25 mars 2013.

  

La sangsue en Egypte ancienne

 

Richard-Alain JEAN

 

Contrairement à une notion bien répandue, nous ne savons pas si des sangsues [1] médicinales [2] ont été utilisées pour les saignées en Égypte aux époques pharaoniques. En effet, aucun texte ne semble faire allusion à cet usage. Le seul élément avancé pour ces dires concerne une interprétation d’une peinture thébaine de la XVIIIe dyn. (TT 56 d’Ouserhat) [3]. Or la scène représente en réalité une jeune recrue se faisant tailler les cheveux à la manière caractéristique des armées et pour laquelle les mèches supérieures humidifiées sont maintenues levées pendant l’opération. Une vasque d’eau est disposée à cet effet au pied du barbier. Assis à l’ombre, d’autres jeunes soldats attendent leur tour. De plus, les vers étaient plutôt considérés comme des êtres primordiaux malfaisants se nourrissant des vivants et des morts (HfAw ; CT, V, 33b ; VI, 346a-d … ; LM, 35), ce qui est, bien entendu, impardonnable pour un esprit égyptien [4] qui pensait également que les serpents étaient des annélides (CT, III, 24a-b) [5]. Parmi eux, les vers intestinaux femelles par exemple (HfAt, fnt, Hsbt, Ddft ), ou non (bTw), et les sangsues, qui devaient être perçues, elles, comme particulièrement voraces. Des Annélides d’eau pourraient bien être citées deux fois dans les papyrus médi­caux. Une fois en comparaison dans le pSmith, et une fois pour provo­quer un effet malfaisant dans le pEbers. Une formulation magique du pEbers (474. 67, 3-4) utilise en effet le ver  anart [6] frit afin de dévaster la chevelure d’une femme détestée ! Son antidote semble être un anneau large de ver solitaire (wawjt) opposant un blanc nacré creux au rouge foncé plein (P. Ebers 461, 66, 1-2), le ver creux affamé pouvant être censé capable d’engloutir le ver plein et d’en annuler ainsi l’effet destructeur. Un  « ver de sang lié » (pSmith 5,18c-19), c’est-à-dire un long caillot sanguin issu du nez et de l’oropharynx est comparé à un  « ver anart vivant dans l’eau » dans une glose du le P. Smith décrivant une fracture de la chambre du nez (Cas n° 12, glose C, 6, 1-3). Cette apparence de ver gorgé de sang peut faire penser à un Annélide de la sous-classe des Hirudinées, donc une sangsue, et probablement à un parasite capable de pénétrer dans l’oro­pharynx des bovins et des hommes buvant l’eau des citernes et des mares et dont les médecins égyptiens ont dû constater les effets néfastes, tout comme bien plus tard les praticiens de la campagne d’Égypte [7]. La localisation du ver de sang et la situation du parasite devant parfois être extirpé à la pince par le médecin dans les mêmes endroits anatomiques, en favorisent aussi le rapprochement. Il est intéressant de rappeler ici que le mot arabe aalaq, une appellation de la « sangsue » [8], désigne également un « caillot de sang », une « chose suspendue », nom verbal de « s’accrocher » aalaqa. Il s’agit probablement de Limnatis nilotica Savigny [9] dont les jeunes, vides, doivent avoir l’épaisseur d’un crin de cheval selon Larrey et qui une fois gorgés de sang sont régurgités par les bestiaux et poursuivent leur croissance dans les mêmes eaux [10]. Hippocrate et Aristote ne font pas mention des sangsues. D’après Hérodote (II, 68), des sangsues (βδέλλα) [11] s’attachent même aux muqueuses de la gueule du crocodile qui s’en fait débarrasser par un oiseau, le trochile (Pluvianus aegyptius). Il pourrait bien s’agir là d’une sangsue à trompe évaginable (Rhynchobdellidae), Ozobranchus de Quatrefage, 1852 [12] (ou Lophobdella Quatrefagesi[13], voire d’une espèce africaine de Placo­bdella [14] (aucune n’est utilisable en médecine) [15].

Un passage bibli­que (Proverbes XXX, 15-16) se fait l’écho réactif de l’horreur que l’on devait avoir vis-à-vis de cet animal. D’après Sydney H. Aufrère, l’insatiabilité de la sangsue (hébreu aalouqah) et de ses filles renvoie également à une passion féminine jamais assouvie et dont la conséquence est traduite sans façon dans la Vulgate (XXX, 16a) avec l’association « infernus et os vulvae » (l’enfer et l’entrée de la vulve). On trouvera une savante exégèse de ce passage commenté par Chénouté dans : S.H. Aufrère, « Une comparaison du démon à la sangsue chez Chénouté (ms. Ifao Copte 1, f9v33-10r12) », dans B. Bakhouche, P. Le Moigne (éd.), « Dieu parle la langue des hommes ». Étude sur la transmission des textes religieux (Ier millénaire), Histoire du texte biblique, 8, Lausanne, 2007, p. 165-178. La similitude des mots hébreux et arabes concernant la sangsue renvoie bien à une racine verbale sémitique et dont le sens est en effet à rapprocher du nom d’un démon-vampire appelé aAulaq en araméen [16]. Réputée s’enivrer du sang des nouveau-nés, la Lîlîth de la Bible (Is. XXXIV,14 ; voir Jb. XVIII, 15 ; puis, du Talmud et du Zohar) est à l’origine un démon femelle dévorateur sumérien puis babylonien, Lîlîtû, à la sexualité débridée. Voir aussi la Lîllaqa du récit de Gilgamesh. Toutes ces démones sont à rapprocher. La sangsue pouvait donc bien représenter pour les anciens une fille [17] d’un grand serpent femelle assoiffé de sang et dangereuse au point de ne pas l’employer vivante (pEbers 474. 67, 3-4). De fait vers et sangsues garderont une certaine connotation diabolique (Jonas, IV,7 ; Marc IX, 43 et 47 ; Avesta IX ; Pline, HN, XX,44). Nous avons déjà parlé de la sangsue qualifiée de « dragon » dans plusieurs idiomes d’Afrique du nord. Chez les Pygmées Aka de la forêt centrafricaine, « rêver de sangsues signifie qu’un sorcier est en train d’attaquer le dormeur » [18]. Chez les Nyamwézi, peuple de langue bantoue habitant le centre du Tanganyika et vivant entre Tabora (ancienne Kazeh) et le lac Victoria, dans la région appelée Unyma­wesi (« Pays de la lune »), Burton nous indique que « les lacs et les rivières contiennent des sangsues que les indigènes regardent comme habitées par des esprits, et qui par ce motif sont inviolables » [19].

Cependant, certaines espèces de sangsues ont pu être utilisées un temps à des fins médicinales à Alexandrie sous l’influence des écrits de médecins grecs comme Nicandre (Thériaque, 930) qui dut en parler le pre­mier (il s’agissait d’auteurs qui en connaissaient aussi les méfaits [20]), puis latins comme Pline (HN, XXXII, 42 § 122). Dioscoride ne parle que de la façon de s’en débarrasser (VI, 32). Galien les dédaigne aussi. Oribase, lui, en décrit bien l’usage d’après Antyllus et Ménémaque (VII, 21-22). Tous ces éléments, positifs et négatifs, seront repris par les Arabes et enrichis avec, par exemple, Avicenne (Canon de la médecine, XXIII), Abulcasis (Chirurgie, LXXXXIX) puis Ibn al-Baytar (Traité des simples, n° 1582). Mais ensuite, selon Prosper Alpin au xvie siècle (La médecine égyptienne, p. 112) les sangsues n’étaient pas utilisées en Égypte. Stationné sur le Nil, à Louqsor en 1831, faute de trouver des sangsues locales, le docteur Angelin dut les remplacer par l’application de ventouses [21]. Au tout début du xxe siècle à Damanhour, l’application de sangsues semble s’effectuer dans des cas déses­pérés, et quand toutes les autres médecines ont échoué [22]. Seuls peut-être dans de grandes villes, des prescripteurs influencés par les médecines arabe, turque ou européennes, en auraient fait un usage modéré et même parfois avec des animaux importés à grands frais, avant d’en exporter d’autres, mais peut-être, moins appropriés [23]. Les traditions paysannes égyptiennes ne paraissent pas non plus en mentionner l’habitude jusqu’à aujourd’hui [24]. Il semble bien en tous les cas que les médecins arabes n’utilisèrent jamais l’hirudothérapie d’une manière aussi frénétique que leurs confrères euro­péens à certaines époques comme au xixe siècle sur les indications de Brous­sais. Par exemple, chez la femme, des sangsues pouvaient êtres appliquées sur la face interne des cuisses et au voisinage du col utérin en cas de dysménorrhées et dans l’éclampsie [25]. Après ces excès, cette thérapeutique fut abandonnée. Les sangsues disparaissent du Codex entre 1937 et 1938. De nos jours, les sangsues médicinales retrouvent un regain d’intérêt en microchirurgie, en rhumatologie, voire dans d’autres spécialités [26]. On utilise des sangsues issues d’élevages occidentaux et dont le pedigree est sérieu­sement attesté [27] et les contrôles biologiques faits pour en assurer l’innocuité infectieuse. Enfin, les applications ne se font qu’avec des sujets « à usage unique » et désinfectés [28].

 


Notes

[1] Notre mot français dérive du latin sanguisuga (Plaute, Ciceron, Horace, Pline). Les sangsues sont des Annélides, classe des Achètes assimilés à la famille des Hirudinées. Dans les années soixante on décrivait déjà plus de 300 espèces réparties en 4 ordres et subdivisés en 127 genres (P.P. Grasse, R.A. Poisson, O. Tuzet, Précis de zoologie, Paris, I, 1961, p. 309-319). Elles avoisineraient aujourd’hui plus de 650 espèces (NCBI : wwwtax.cgi?name=Hirudinea). Pour les espèces les plus importantes, on peut maintenant consulter : J. Euzéby, Grand dictionnaire illustré de parasitologie médicale et vétérinaire, Paris, 2008, p. 217, 394, et, par ordre alphabétique. Pour les Hirudinées strictement « sanguivores » des vertébrés nous avons principalement : HirudoHaementeriaPoecilobdellaHaemadipsidaeTheromyzon tessulatumPiscicolaPontobdellaBranchellion. Parmi les Hirudinées « prédatrices », Haemopis sanguisuga, dite aussi à tort « sangsue noire du cheval » et malgré sa dénomination, n’est pas « sanguivore » car sa bouche ne peut pas percer la peau. Elle se nourrit de vers.

[2] Très peu d’espèces sont utilisables en médecine, même si en principe, toutes les sangsues qui s’attaquent à l’homme, à l’exception de celles qui provoqueraient des lésions profondes, pourraient très théoriquement être utilisées. Ainsi, pratiquement, on n’a recours qu’à des Hirudinées. Les plus courantes en France sont Hirudo medicinalis L. (grise) et Hirudo officinalis M-T. (verte) qui n’en est qu’une variété (ordre des Gnathobdelliformes). Distribution géographique d’Hirundo medicinalis L. (et variantes) : Îles britanniques, Scandinavie méridionale, Europe continentale à l’ouest de l’Oural et en Turquie occidentale (S.F. Craig, D.A. Thoney, N. Schlager, J.E. trumpey, Grzimek’s Animal Life Encyclopedia, New York, 2004, II, p. 80-81). À certaines époques consommatrices où les sangsues vinrent à manquer en Europe, des sujets crus comparables ont été importés d’Afrique du Nord, puis, avec plus de succès, d’Asie Mineure (80 millions en 1927). En Égypte on trouvait Limnatis Nilotica S. En Afrique du Nord on a pu aussi utiliser Hirudo Troctina Johannson (Truite, ou encore « Dragon d’Alger »), et encore dans le genre Limnatis M-T, l’espèce myseomelas H. (Sahara). On a pu trouver, mêlées aux sangsues du commerce, des « sangsues bâtardes » (HaemopisNephellisAulastone …). Or, elles ne sont pas organisées pour entamer la peau des mammifères et ne peuvent être d’aucune efficacité (P.L. Cottereau, Notes sur les sangsues qui sont livrées pour le commerce, Paris, 1846, p. 2-3). De plus, les autres genres de sangsues sont considérées seulement comme des parasites et peuvent même parfois générer des accidents mortels chez l’homme et l’animal (E. Brumpt, Précis de parasitologie, Paris, 1949, II, p. 1045-1056). Brumpt à donné en son temps une  liste des parasites rencontrés dans le tube digestif de la simple sangsue médicinale avec la durée de viabilité de chacun d’eux : bacille de Koch, 60 jours ; bacille d’Eberth, 7 jours ; bacille paratyphique, 3 mois ; bacille du rouget du porc, 10 jours ; bactéridie charbonneuse, l0-14 jours ; virus du typhus exanthématique, 2 jours ; virus de la peste porcine, 20 jours ; virus de la variole aviaire, 4-20 jours ; spirochète de la fièvre récurrente, 4-20 jours ; spirochète aviaire, 7 jours ; tréponème de l’ictère hémorragique, 7-19 jours ; trypanosoma brucei, l-3 jours ; trypanosoma equi­perdum, 4 jours … autres trypanosomes (R.N. Mory, D. Mindell, D.A. Bloom, « The Leech and the Physician : Biology, Etymology, and Medical Practice with Hirudinea medicinalis », World J Surg, 24, 2000, p. 878-883), des microorganismes vecteurs de la syphilis, de l’érysipèle (P. Scaps, « Le commerce des annélides », Bull Soc Zool Fr, 129, 1-2, 2004, 37-48), des fièvres puerpérales (Ricarimpex ®, Dossier scientifique, 2004) … et aussi le virus de l’hépatite B, Borrelia, des hématozoaires du paludisme, de Cryptobia et d’hémogrégarines (voir aussi : S.L. Adams, « The medicinal leech : A page of the annelids of internal médicine », Ann Int Med, 109, 1988, p. 399) … Serratia marcescens et Vibrio fluvialis (I.S. Whitaker, B. Elmiyeh, « Hirudo medicinalis : the need for prophylactic anti­biotics », Plast Reconstr Surg, 112, 4, 2003, p. 1185-1186), Aeromonas hydrophila, Aeromonas sobria, et Aeromonas caviae (symbiotes Gram- ). Même à utilisation médicinale, les sangsues « exotiques » ont bien entendu infiniment plus de chances de véhiculer un très grand nombre de germes pathogènes (certains sont propres au animaux mais assez voisins de ceux transmis ou atteignant l’homme). D’où peut-être aussi la prudence expérimentale et ancestrale des médecins des pays chauds et surtout de leurs devanciers démunis de moyens antibiotiques appropriés.

[3] Pour un cliché, voir par exemple :  Osiris.net/tombes/nobles/ous56/ouserhat 56_01.htm : vue tb070.

[4] P. Vernus, J. Yoyotte, Bestiaire des pharaons, Paris, 2005, p. 339. Les sang­sues s’attaquent aussi à des animaux très importants dans la théologie égyptienne. Mûrie a trouvé des sangsues dans le fond des fosses nasales d’un hippopotame tué sur la rivière Aye, tributaire du Nil Blanc (R. Blanchard, « Description de quelques hirudinées asiatiques », Mém Soc Zool Fr, Lille, 1896, p. 319-320). Nous reparlerons du crocodile et des tortues.

[5] Autrement dit, pour les anciens Égyptiens, les serpents étaient de grand vers et les vers étaient des petits serpents. Les Textes des Sarcophages sont très clairs à ce sujet en parlant des serpents pourvus d’anneaux (CT III, 24a-b ; 61h-i ; 101a-b ; 115e-f ; 116e-117a ; 120b-c …).

[6] Wb I, 191, 15 ; Hannig-Wb II,1 - 5306 « Blut-Gerinnsel » (caillot de sang) ; Nunn, 1996, p. 217 « unidentified worm » (ver non identifié) ; Lefebvre, 1956, p. 50, « (ver)-ânâret », « ver de marais » ; Bardinet 1995, p. 319 et 503 « ver-ânârt » ; Westendorf, 1999, II, p. 630 et « Wasserwurm » (ver d’eau), voir aussi II, p. 722.

[7] Par exemple, avalée avec l’eau, Limnatis Nilotica peut se fixer dans le pharynx, sur les amygdales, les cordes vocales, la cavité nasale ou buccale et même oculaire. Au cours d’une baignade, certaines peuvent attaquer les muqueuses vulvovaginale et uréthrale. Le Musée du Val-de-Grâce possède une Limnatis nilotica provenant du pharynx d’un soldat, entré pour cette raison à l’Hôpital militaire de Constantine, en 1880. Malgré des tentatives réitérées, M. Laveran ne put parvenir à extirper le parasite, qui causait d’abondantes hémorragies et qui se détacha spontanément au bout d’un mois (R. Blanchard, « Courte notice sur les hirudinées », Bull. Soc Zool Fr, Paris, 1891, XVI, p. 221). Sa présence dans les fosses nasales d’un nourrisson peut déterminer de très sévères anémies (F. Cheikh-Rouhou, M. Besbes, F. Makni, M. Chaabouni, A. Ayadi, « Limnatis nilotica, Cause d’anémie sévère chez un nourrisson », Médecine tropicale, 60, 1, 2000,  p. 100-101).

[8] Voir par exemple le Dictionnaire d’Histoire Naturelle, Paris, 1822, II, p. 238 ; F. Cuvier, Dictionnaire d’Histoire Naturelle, Paris, 1827, XLVII, p. 257 (alak). Voir aussi aléqaaléthaalag.

[9] Limnatis Nilotica Savigny (Bdella nilotica Savigny, 1822), sangsue commune en Afrique du Nord (Blanchard, 1908 ; Seurat 1922 ; Autrum, 1939). Elle aurait disparu d’Égypte (Selon les travaux de N.A. El Shimy et Col., 1987-2000 ; voir par exemple : N.A. El Shimy, Ecological and biological studies on freshwater Hirudinea, Ph.D. Thesis, Univ. Assiut, 1987 ; M.A. Hussein, R. Kinzelbach, N.A. El Shimy, « The life cycles of three freshwater leeches (Hirudinea) from Egypt », Bull Fac Sci, Univ Assiut, XVII, Assiut, 1988, p.  45-60 ; N. A. El Shimy, « Checklist of freshwater leeches (Hirudinea) in Egypt », Bull Fac Sci Assiut Univ, Assiut, 1990, XIX, 1990, p. 27-34). Voir également pour cet animal : R. Ben Ahmed,S. Tekaya, H. Harrath, « Étude préliminaire des Hirudinés en Tunisie : Description et systématique (Clitellata, Hirudinea) », Bull Soc Zool Fr, Paris, 2008, 133 (1-3), p. 81-95.

[10] P. Mégnin, « Sangsues d’Algérie et de Tunisie ayant séjourné plus d’un mois dans la bouche de Bœufs et de chevaux », Bull Soc Zool Fr, Paris, 1891, XVI, p. 222.

[11] Le mot grec désigne bien l’action de « sucer » (Chantraine, 1968, p. 171 et 180).

[12] H. Harant, P.-P. Grassé, op. cit., 1959, V, p. 562 et 580, fig. 418 p. 579.

[13] A. Dechambre, L. Lereboullet, Dictionnaire Encyclopédique des Sciences Médicales, Paris, 1864, p. 137. Voir aussi :  Bulletin de la société de Zoologie, vol. 24, Lille, 1899, p. 236 (séance du 12 décembre 1899) ; J.A. Thomson, Outlines of Zoologie, New York, 1930, p. 244.

[14] En effet, en Afrique, plusieurs exemplaires de Placobdella sp. ont été trouvés aussi bien sur des substrats aquatiques que sur des reptiles : crocodiles, tortues d’eau (I. Paperna,
H. Steinitz, « Infestation des poissons par des Annélides : Hiru­dinés », Parasites, infections et maladies du poisson en Afrique, Doc. FAO, CPCA-T7, Rome, 1982, p. 109). Il s’agit aussi pour un saurien d’Amérique du Nord, Alli­gator mississipiensis, de P. multilineata (T. Wang, R.W. Davies, « The morpho­logy of Placobdella multilineata (Hirudinoidea : Glossiphoniidae) a parasite of Crocodilia », Canadian Journal of Zoology, 63, 3, 1985, p. 550-551), et de P. papillifera (F.L. Frye, Reptile care : an atlas of diseases and treatments, Neptune City, 1991, p. 637). Puis en Asie, pour Crocodylus siamensi, de P. ornata (H. Khoa, « Placobdella ornata : the parasites of crocodile and the treatment measures », Vinh Hiep crocodile farm at Nha Trang, 13, 1, 2006, p. 60-65). Et encore, de P. costata pour la tortue d’eau douce Emys orbicularis, ce genre de sangsue étant commun en Afrique du Nord (R. Ben Ahmed, communication personnelle, septembre 2009). Une de ces espèces de sangsues, mais d’origine africaine, n’a-t-elle pas pu atteindre Crocodylus niloticus Laurenti quand il était encore présent dans la Vallée du Nil, le Fayoum et dans le Delta Égyptien ?

[15] En effet, « il n’y a point de vraie sangsues, Hirudo L., dans les eaux vives qui battent la tête des îles. Il en existe en Égypte, mais c’est seulement dans les puits, dans les bassins fermés, et généralement dans les eaux tranquilles » (Geoffroy Saint-Hilaire, « Description des reptiles », Description de l’ÉgypteHistoire Naturelle, I, Paris, 1809, p. 200). Le même auteur ajoute que « le bec des petits pluviers seroit trop foible pour entamer, pour les dilacérer, et pour les amener au point qu’elles puissent lui être profitable comme nourriture » (p. 204). Il leur préfère alors les cousins capables de tapisser la surface du palais d’un crocodile observé mort (p. 202). Cependant, Hérodote parle aussi de ce moustique qu’il nomme, dans le même livre, κώνωψ (II, 95) et qu’il différencie bien de la sangsue qu’il nomme βδέλλα (II, 68). Des observations modernes confirment la position d’Hérodote (H. B. Cott, « Scientific results of an inquiry into the ecology and economic status of the Nile Crocodile ‘Crocodilus niloticus’ in Uganda and Northern Rhodesia », Trans of the Zool Soc of London, 29, part. 4, avril 1961). D’autres observations ont été faites au Sénégal. En réalité l’oiseau prélève des débris de viande et des vers de toutes sortes dont parfois des sangsues et des insectes. D’après Raja Ben Ahmed, les placobdelles se trouvent généralement sur les téguments externes des tortues et des crocodiles (communication personnelle, septembre 2009).

[16] Nom provenant très probablement du verbe sémitique ‘aulaq « mâcher » : C. Brockelmann, Grundriss der vergleichenden Grammatik der semitischen Spra­chen, Berlin, 1908, I, p. 344 (‘aulak).

[17] Les sangsues n’abandonnent pas leur progéniture. Les cocons restent sur l’ani­mal. Chez les Glossiphoniidae, après éclosion, c’est par la ventouse postérieure que les jeunes restent attachés à leur porteuse et pour une durée de quelques semaines (GlossiphoniaHemiclepsis) à quelques mois (2 à 3 pour Theromyzon tessulatum). Plusieurs jeunes peuvent aussi émerger d’une poche ventrale de leur porteuse, comme Marsupiobdella africanus. Les sangsues « filles » sont alors bien visibles (H. Harant, P.-P. Grassé, « Classe des annélides achètes ou Hirudinées ou Sangsues », dansP.-P. Grassé (éd.), Traité de Zoologie. Anatomie, Systé­matique, Biologie, Paris, 1959, V, p. 559, et fig. 408 p. 575).

[18] J. M. C. Thomas, S. Bahuchet, A. Epelboin, Encyclopédie des Pygmées Aka, II, Dictionnaire Éthnographique Aka-Français, fascicule 6, SELAF 410, Paris, 2004, p. 260.

[19] Capitaine Burton, « Voyage aux grands lacs de l’Afrique Occidentale, 1857-1859 », dansE. Charton (éd.), Le Tour du Monde - Nouveau Journal des Voyages, Paris, 1860, p. 305.

[20] J.-M. Jacques, « A propos des sangsues : Nicandre de Colophon, Galien, Aétius d’Amida, et le baron Dominique-Jean Larrey », dans V. Boudon-Millot, A. Guardasole, C. Magdelaine (éd.), La science médicale antique. Nouveaux regards. Études réunies en l’honneur de Jacques Jouanna, Paris, 2008, p. 275-287.

[21] Angelin, « Le choléra morbus en Haute-Égypte en 1831 — Rapport du docteur ANGELIN à bord du navire le LUXOR - Rapport du bâtiment Le Luxor », Annales Maritimes, du 4 octobre 1831, p. 3 (Rapport transmis par Frédérique Sultana, octobre 2006).

[22] Dans le risque de perdre un œil en raison d’une ophtalmie purulente par exem­ple, l’oculiste laisse la place au barbier qui pose une sangsue, mais le mal ne fait qu’em­pirer sous ce traitement (Ch. Vial, « Panorama de la société égyptienne d’après trois autobiographies », Annales islamologiques, 15, Le Caire, 1979, p. 378-379).

[23] Pour les périodes situées en dehors d’une véritable mode occasionnée par une forte demande d’exportation de la part des pays européens ne trouvant plus de sangsues médicinales chez eux et après l’approbation du vice-roi pour ce commerce.

[24] Voir par exemple les techniques de saignées pratiquées dans les campagnes égy­ptiennes au xixe et au xxe siècle et rapportées par : W.S. Blackman, Les Fel­lahs de la Haute-Égypte, Paris, 1948, p. 181-182 ; N.H. Henein, Mari Girgis, Vil­lage de Haute-Égypte, Le Caire, 2001, p. 213-214 ; P. Du Bourguet (Commu­nication personnelle, décembre 1979).

[25] Et cela malgré certaines recommandations pourtant déjà bien connues : L. Vitet, Traité de la sangsue médicinale, Paris, 1809, p. 557-558.

[26] Dossiers Ricarimpex ®, 2004-2009.

[27] Animaux d’origine européenne pour la France et les pays limitrophes. Des animaux d’origine turque du nord sont utilisés dans une société suisse. Ces sociétés exportent dans le Moyen-Orient, en Afrique du Nord et en Amérique du Nord.

[28] Par exemple, une décontamination extérieure : les sangsues sont plongées dixsecondes dans une solution de chlorhexidine au 1/5000e, après deux rinçages dans l’eau pure, elles sont remises dans l’eau distillée (S. Malassi, Monographie sur les sangsues, Documents de référence — Histoire et art pharmaceutique, Ordre des Pharmaciens, Paris, 2005, p. 15).

 


 

Article original complet du lundi  11 mars 2013 :

 

Momie et Bonaparte Image 1

 

Xavier RIAUD, "Bonaparte, fondateur de l’Institut d’Egypte", dans Histoire de la médecine en Egypte ancienne, Cherbourg, 11 mars 2013.

 

L'INSTUT D'EGYPTE

Bonaparte, fondateur de l’Institut d’Egypte

par

Xavier Riaud*

 

Cet article n’a pour but que de dresser un bref historique de l’Institut d’Egypte et d’en faire percevoir l’utilité sur un plan strictement médical.

En 1798, Bonaparte embarque à Toulon pour une expédition sur le sol des pharaons. Accompagné d’un corps d’armée d’élite, il s’est entouré aussi d’une équipe de scientifiques de très grand renom. Toutes les disciplines y sont représentées pour véhiculer la connaissance européenne en Egypte et faire comprendre cette culture aux Français. Jamais auparavant une expédition militaire n’avait été entourée d’un aussi grand nombre d’éminents intellectuels. Il demande à Antoine Dubois (1756-1837), professeur de clinique chirurgicale à l’Ecole de santé de Paris depuis 1796, de diriger l’équipe médicale. Il commande alors aux 108 officiers de santé de l’expédition. Le 18 avril, le médecin embarque à Toulon, dans le navire-amiral l’Orient. Le 2 juillet 1798, le corps expéditionnaire débarque à Alexandrie. Après la prise du Caire, Bonaparte réunit six sommités les plus importantes dont Desgenettes et Monge, son futur président, le 20 août, afin qu’ils définissent le règlement interne et les membres qui siégeront dans cet institution.

Le 20 août, le décret émis par Bonaparte paraît : « Il y aura en Egypte, un Institut pour les sciences et les arts, lequel sera établi au Caire. Cet établissement aura principalement pour objet :

1/ le progrès et la propagation des lumière en Egypte ;

2/ la recherche, l’étude et la publication des faits naturels, industriels et historiques de l’Egypte ;

3/ de donner son avis sur les différentes questions pour lesquelles il sera consulté par le gouvernement. »

Le général officialise la création de l’Institut d’Egypte, le 22 août. Cette institution est bâtie comme l’Institut de France avec laquelle elle entretient une correspondance étroite, certains de ses membres appartenant aux deux. L’Institut de France d’ailleurs a publié les premiers procès-verbaux de son homologue égyptienne (Vercoutter, 1987). C’est une académie qui comprend 4 sections (Mathématiques ; Physique et histoire naturelle ; Economie politique ; Littérature et Beaux-Arts) et aurait dû compter 12 membres par section (Beaucour, 1970). Très vite, le nombre de ses membres ne dépasse pas 36. Bonaparte, son vice-président, intègre Dubois à la section de physique et histoire naturelle dès le 22 août (Ganière, 1988). Dubois, malade, quitte l’Egypte en 1799. Après, cette section ne comprend que 5 membres (Berthollet, Dolomieu, Desgenettes, Conté, Geoffroy Saint-Hilaire) et n’a jamais dépassé le nombre de 10 membres. Larrey n’y siège pas à sa fondation, mais cela ne l’empêche pas de commencer une collection de crânes à des fins anatomiques. La première séance est placée sous la présidence de Gaspard Monge, le 23 août. Sa dernière, la 62ème, se tient le 22 mars 1801 (http://fr.wikipedia.org (b), 2010). L’Institut d’Egypte est installée dans le palais de Qassim Bey, dans les faubourgs du Caire, situé à seulement 2 km du quartier général (Gallo, 1998). Le registre des séances est ramené en France par son Secrétaire perpétuel, en 1801, et est égaré en 1807 (Vercoutter, 1987). Au début de chaque séance, les membres présents nommaient des commissions, les unes pour répondre aux questions de Bonaparte et les autres, pour rédiger des rapports sur les mémoires lus en séance (Vercoutter, 1987).

L’objectif de cet Institut est de recueillir des informations sur l’Egypte et sa civilisation, mais dès la première réunion, le général français demande à ces membres d’étudier tous les moyens possibles pour améliorer la vie des troupes en Egypte. En fait, il pose 6 questions et les commissions, à peine formées, se sont mises au travail de suite (Beaucour, 1970). Les médecins de la section de physique et de science naturelle débattent, cherchent et émettent des mémoires faisant la synthèse de leurs trouvailles. Les sujets portent notamment sur l’hygiène, l’alimentation ou les épidémies. Ainsi, en est-il de Larrey qui publie plusieurs traités qui établissent sa réputation scientifique jusqu’en France où ses travaux sont reconnus (Marchioni, 2003). Les médecins communiquent devant leurs autres collègues de l’Institut qui devient un vrai organisme de recherches, mais aussi de débats et de discussions. Il y a un séance de 7 h00 à 9 h00 tous les jours et deux fois par mois en fin d’après-midi (Vercoutter, 1987). A la séance du 26 Fructidor an VI, Desgenettes effectue une lecture sur des maladies ayant une étiologie proche de la peste, pourtant distinctes de cette dernière. Les travaux, ou procès-verbaux de séance, sont publiés dans une revue scientifique, La Décade égyptienne (Beaucour, 1970). Desgenettes est président de séance et le rédacteur en chef de ce journal (Marchioni, 2003 & Ducoulombier, 2004). Ainsi, Larrey et Desgenettes font-ils paraître des circulaires d’informations sur l’hygiène, la prophylaxie et la thérapeutique aux officiers de santé de l’armée française, qui sont tirées à plusieurs centaines d’exemplaires par l’imprimerie nationale du Caire sous la direction de Jean-Joseph Marcel en quelques heures. Ces documents sont ensuite acheminés dans les deltas par courriers postaux (Marchioni, 2003 ; Ducoulombier, 2004 & Riaud, 2010). D’ailleurs, Larrey est élu au sein de l’Institut, le 4 juillet 1799, dans la section de physique. Dans la même année, il publie son mémoire de 38 pages intitulé Mémoire sur le tétanos traumatique consécutif à l’observation des blessures engendrées par les projectiles turcs, qui fait grand bruit. En 1798, sans en être membre, il avait fait paraître son Mémoire sur l’ophtalmie endémique en Egypte qui avait déjà été consacré (Marchioni, 2003). En 1800, c’est autour du Mémoire sur la fièvre jaune, considérée comme complication des plaies d’arme à feu de paraître. Suivent de hepatitis et L’atrophie des testicules. En 1801, il autopsie le corps de l’assassin de Kléber, l’embaume et le fait exposer au Musée d’histoire naturelle (Marchioni, 2003). Il aurait embaumé le corps de Kléber également. Desgenettes, quant à lui, dresse une Topographie physique et médicale de l’Egypte, un Avis sur la petite vérole, communique sur l’Ophtalmie régnante ou sur la Salubrité de l’Egypte. Il établit avec exactitude les statistiques nécrologiques de la ville du Caire. Ses études sont regroupées dans les Opuscules du citoyen Desgenettes, médecin en chef de l’armée d’Orient qui sont publiées en 1799-1800 par l’imprimerie nationale. Dans le tome 1 de la Décade égyptienne, il publie notamment un « Rapport sur le Môristan ou hôpital du Kaire » (p. 275) (Ducoulombier, 2004 ; Viel & Fournier, 1999). Cette section de physique et science naturelle, de même que les autres, est donc florissante et prolifique en recherches, collections et publications. Tous ses membres travaillent constamment au service du savoir et de la connaissance.

Dans le palais, sont aménagés une bibliothèque, un laboratoire de chimie, un cabinet de physique, un jardin d’essai, etc (Beaucour, 1970).

Lors de l’insurrection du Caire, les savants prennent les armes pour défendre l’Institut et se joignent aux troupes de Bonaparte pour réprimer l’insurrection. Certains savants y perdent la vie. Il en est de même au cours de l’expédition en Syrie. De retour au Caire, Bonaparte demande à l’Institut d’étudier la peste qui a sévit à Jaffa et à St Jean d’Acre (Beaucour, 1970).

Lorsque Bonaparte quitte l’Afrique, l’Institut est en plein désarroi, encore plus lorsque le général Kléber, qui lui était très favorable, est assassiné. Menou, qui lui succède, même s’il est bien intentionné, est très maladroit. Pourtant, il réorganise la bibliothèque et le cabinet de physique (Beaucour, 1970). En février 1801, ayant appris que la Décade égyptienne était imprimée aux frais de Jean-Joseph Marcel, Menou demande qu’elle soit désormais imprimée aux frais du gouvernement et qu’elle devienne le recueil des seuls travaux de l’Institut. Desgenettes, par cette mesure, s’est senti offusqué et a donné sa démission. Mais, après explications avec Menou, il l’a retirée (Ducoulombier, 2004). L’Institut a, dans son ensemble, approuvé cette mesure qui la hissait au rang des principales académies d’Europe (Noirot, 1998). Lors de la reddition, Menou parvient à négocier avec les Anglais, la conservation des archives, mémoires et collections amassées en Egypte, qu’il ramène en France (Beaucour, 1970). Larrey, notamment, conserve ses notes qu’il destine à publications dès son retour en France et ses collections de crânes, et de momies (Marchioni, 2003). Menou a été salué globalement par les savants comme un des généraux qui a facilité et encouragé leurs activités respectives (Noirot, 1998).  

Au retour d’Egypte, Chaptal, alors ministre de l’Intérieur, nomme huit membres de l’expédition scientifique, le 18 février 1802, avec pour mission de collecter tout le matériel scientifique et de le publier. Cette entreprise avait été initialisée par Kléber en 1799. De 1809 à 1828, paraissent les 20 volumes intitulés Description de l’Egypte ou Recueil des observations et recherches qui ont été faites en Egypte pendant l’expédition de l’armée française. 9 d’entre eux sont exclusivement du texte. Ce travail comprend 974 planches, dont 74 en couleur. La section de physique et de science naturelle serait concernée par 5 ( ?) volumes (http://fr.wikipedia.org (a), 2010). A son retour d’Egypte, Larrey rencontre le futur Napoléon, en mars 1802. Il lui présente sa Relation chirurgicale de l’expédition d’Orient qu’ému, le Premier Consul reçoit et transmet aussitôt à son secrétaire en lui ordonnant de le publier dans la Description d’Egypte (Marchioni, 2003). Dans cet ouvrage, il publie aussi en 1809, un « Mémoires et observations sur plusieurs maladies qui ont affecté les troupes de l’armée française pendant l’expédition d’Egypte et de Syrie et qui sont endémiques dans ces deux contrées » (Etat moderne, tome 1, pp. 427-524), et en 1812, une « Notice sur la conformation physique des Egyptiens et des différentes races qui existent en Egypte, suivie de quelques réflexions sur l’embaumement des momies » (Etat moderne, tome 2, pp. 1-6) (Viel & Fournier, 1999). Des pharmaciens communiquent également. Au nombre de 4 dans l’expédition, Rouyer publie une « Notice sur les embaumements des anciens Egyptiens » en 1809, dans la Description d’Egypte (Antiquités, tome 1, pp. 207-220) et la même année, une « Notice sur les médicaments usuels des Egyptiens » (Etat moderne, tome 1,          pp. 217-232) (Viel & Fournier, 1999). Commencée sous Napoléon, la parution s’achève sous Charles X. La première édition est publiée par l’Imprimerie impériale, qui devient l’Imprimerie nationale après le retour à la monarchie. La deuxième édition est faite par les éditions Panckoucke (http://fr.wikipedia.org (b), 2010).

Par ordre d’apparition dans le texte :

 

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Antoine Dubois (1756-1837) (Corlieu, 1896, © BIUS).

 

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René-Nicolas Dufriche Desgenettes (1762-1837) (© BIUS).

 

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Claude Louis Berthollet (1748-1822) (© BIUS).

  

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Dominique Jean Larrey (1766-1842) (© BIUS).

  

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Jean Antoine Chaptal (1756-1832) (© BIUS).

  

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Couverture du recueil Description de l’Egypte, édition de 1809.

 

Références bibliographiques :

Beaucour Fernand, « L’Institut d’Egypte et ses travaux », in Souvenir napoléonien, http://www.napoleon.org, 1970, n° 255, pp. 11-13.

Bibliothèque interuniversitaire de Santé, communication personnelle, Paris, 2010.

Corlieu Auguste, Centenaire de la Faculté de Médecine de Paris (1794-1894), Alcan – Baillère – Doin – Masson (éd.), Paris, 1896.

Ducoulombier Henri, Le baron Pierre-François Percy, chirurgien de la Grande Armée, Librairie Historique Teissèdre, Paris, 2004.

Gallo Max, Napoléon – Le chant du départ, Magellan (éd.), vol. 2, Paris, 1998.

Ganière Paul, « Dubois Antoine (1756-1837), médecin », in Revue du Souvenir napoléonien, décembre 1988 ; 362 : 51-52.

Ganière Paul, « Desgenettes, René-Nicolas (1762-1837), médecin », in Revue du Souvenir Napoléonien, http://www.napoleon.org, Fondation Napoléon, 1988, pp. 47-48.

http://fr.wikipedia.org (a), Description de l’Egypte, 2010, pp. 1-6.

http://fr.wikipedia.org (b), Institut d’Egypte, 2010, p. 1.

Marchioni J., Place à Monsieur Larrey, chirurgien de la Garde impériale, Actes Sud (éd.), Arles, 2003.

Noirot Paul, La campagne d’Egypte (1798-1801), mythes et réalités, In forma (éd.), Paris, 1998.

Riaud Xavier, « René-Nicolas Dufriche, baron Desgenettes (1762-1837), médecin chirurgien de la Grande Armée », in The International Napoleonic Society, Montréal, 2010, http://www.napoleonicsociety.com, pp. 1-3.

Vercoutter Jean, Compte-rendus des séances de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, 1987, vol. 131, n°3,                pp. 619-620.

Viel Claude & Fournier Josette, « Voici deux cents ans : les pharmaciens et l’expédition d’Egypte », in Revue d’histoire de la pharmacie, 1999 ; 322 : 265-267.

 

(*) Docteur en Chirurgie Dentaire, Docteur en Epistémologie, histoire des sciences et des techniques, Lauréat et membre associé national de l’Académie nationale de chirurgie dentaire, membre libre de l’Académie nationale de chirurgie.

 


 

Article original complet - vendredi 22 février 2013 et samedi 23 février 2013 :

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Xavier RIAUD, "Apport de l'étude de l'ADN et de la structure minérale d'une dent en archéologie et en odontologie médico-légale à travers quelques cas historiques", Première partie, dans Histoire de la médecine en Egypte ancienne, Cherbourg, 22 février 2013.

  

Introduction de Richard-Alain JEAN

La paléobiologie moléculaire

 

Xavier RIAUD nous propose maintenant un article en deux parties, certes à caractère archéologique plus qu'égyptologique, mais qui démontre bien l’importance des moyens multidisciplinaires à mettre en œuvre au cours des enquêtes paléopathologiques afin d’élucider des diagnostics au moyen, ici, de la biologie moléculaire. Les « examens complémentaires », dont nous avons besoin en médecine quotidienne, se trouvent en effet catapultés au premier plan, faute de pouvoir exercer une observation clinique ordinaire sur les restes humains qui nous parviennent (!) De plus, les squelettes, et même les momies, peuvent ne pas être complets, alors que l’on comptait justement sur une pièce anatomique particulière pour établir un fait. Assez souvent, nous ne possédons que la tête d’une personne ou d’un animal donné, et ceci à toutes les époques. Or il se trouve par exemple, que les mâchoires recèlent bien des indices cachés, d’où l’intérêt d’étudier les organes dentaires qui peuvent se révéler contenir de véritables archives – individuelles, puis collectives, voir écologique d’un système – qui sont en quelque sorte, des éléments marqueurs du temps et donc se trouvent, pour les archéologues des corps, très précieux à cet égard. Les praticiens de l’histoire de la médecine sont donc actuellement amenés à prescrire des épreuves biophysiques et chimiques afin de déterminer une quantité de facteurs biologiques et médicaux qui nous renseigneront – cette fois avec des marges d’erreurs de plus en plus restreintes, par rapport aux méthodes jadis utilisées – sur l’anthropologie et l’état de santé des hommes qui nous ont précédés en Égypte et dans d’autres contrées du monde antique.

Nous trouverons d’abord, aujourd’hui, la première partie consacrée à l’ADN pulpaire, puis demain, la deuxième partie, consacrée à la structure minérale.

 

Richard-Alain JEAN

 

Première partie : article original du 22 février 2013

 

 

APPORT DE L’ETUDE DE L’ADN ET DE LA STRUCTURE MINERALE D’UNE DENT EN ARCHEOLOGIE ET EN ODONTOLOGIE MEDICO-LEGALE A TRAVERS QUELQUES CAS HISTORIQUES

INPUTS ON THE STUDY OF DENTAL DNA AND DENTAL MINERAL STRUCTURE IN ARCHAELOGY AND FORENSIC DENTISTRY THROUGH HISTORICAL CASES

par 

Xavier RIAUD *, **, ***

 

Résumé

Sur un site archéologique ou sur une scène de crime (s), des organes dentaires sont parfois découverts. Une dent est imputrescible et, à ce titre, constitue un outil médico-légal extraordinaire, une source d’informations qui, si elle est bien exploitée, peut se révéler quasiment intarissable. Que ce soit par l’étude de son ADN, qui demeure une technique très onéreuse, ou bien de sa structure minérale, une dent offre des champs d’investigations quasi illimités, pourvu que l’ADN soit intact et exploitable au vu des vestiges anciens retrouvés sur les sites. A travers différents exemples historiques, voici quels sont les renseignements délivrés par une dent unique après étude de son ADN et/ou de sa structure minérale.

Summary

Dental organs are often found on archaeological sites or on crime scenes. The teeth are rootproof and therefore, they constitute extraordinary forensic tools as well as a great source of information which, if they are used appropriately, can turn out to be an almost unfailing source. Teeth offer unlimited investigation fields whether they focus on the study of their DNA, which remains a very onerous technique, or on the study of its mineral structure. However, to undertake such scientific research requires that the DNA must remain intact and usable which usually depends on the remains found on the sites. Through several historical examples, here are the information that a tooth can reveal after the examination of its DNA or/and its mineral structure.

Mots-clés

Dent, ADN, archéologie, odontologie médico-légale, histoire.

Keywords

Tooth, DNA, Archaeology, Forensic dentistry, History.

__________________

* Docteur en Chirurgie Dentaire, Docteur en Epistémologie, Histoire des Sciences et des Techniques, Lauréat et membre associé national de l’Académie Nationale de Chirurgie Dentaire.

** Directeur de la Collection « Médecine à travers les siècles » aux Editions L’Harmattan.

*** Chercheur au Centre François Viète d’Histoire des Sciences et des Techniques (EA 1161) – Université de Nantes.

__________________

 

—   Première partie   —

 

L’ADN pulpaire

 

Aujourd’hui, l’ADN de la pulpe d’une dent, à l’abri de toute pathologie dentaire, constitue un moyen d’investigation remarquable en odontologie médico-légale, mais aussi en archéologie. En effet, de nombreuses recherches historiques emploient ce procédé scientifique afin de préciser différents éléments comme l’origine d’un corps, son identification, les causes de sa

mort et son éventuelle filiation, voire même son positionnement dans la longue chaîne de l’évolution humaine. Voici quelques exemples historiques où l’analyse de l’ADN pulpaire a donné des résultats extraordinaires.

 

Origine

En Andorre, à Segudet, des restes humains provenant d’une tombe préhistorique découverte ont été découverts dans la paroisse d’Ordino, à une altitude de 1324 m. Ce corps appartient à la période du néolithique ancien (période épicardial située entre 4300 et 4050 av. J.-C.). Ces restes ont été déposés pour étude au laboratoire de Paleoanthropologie de la Unitat d'Antropologia, Dept. Biologia Animal, Vegetal i Ecologia, Universitat Autònoma de Barcelona, ont été identifiés sous le sigle S-2001. Le squelette appartiendrait à un individu adulte, de sexe féminin, dont l’âge au décès a été évalué entre 30 et 35 ans. Après étude de l’ADN mitochondrial d’une canine supérieure droite (13), il a été déterminé que l’individu appartenait à l’haplogroupe européen K, caractérisé par un âge compris entre 12 900 et 18 300 ans. Ainsi,  cet haplogroupe est présent dans les populations néolithiques du Pays Basque et est majoritairement rencontré dans les populations autochtones d’Andorre [DÍAZ, SOLÓRZANO, MONTIEL, GARCÍA, YAÑEZ, MALGOSA, 2004].

 

Ötzi est le nom donné à un corps congelé et déshydraté, retrouvé dans les Alpes de l’Ötztal, à la frontière entre l’Italie et l’Autriche, découvert le 19 septembre 1991. Agé d’environ 46 ans, il aurait vécu entre 3 350 et 3 100 av. J.-C. L’étude de son ADN dentaire a permis de déterminer qu’il appartenait à la subdivision K1 de l’haplogroupe européen K, très fréquemment rencontré au sud des Alpes et dans la région de l’Ötztal [AQUARON, 2005 & 2008].

 

Identification médico-légale

Le 15 avril 1912, à 2h20, le Titanic coule après avoir heurté un iceberg. 1 496 passagers meurent sur les 2 208 passagers. Quelques corps sont repêchés. Parmi eux, un enfant inconnu est découvert le 21 avril et est inhumé au cimetière de Fairview Lawn de Halifax, Canada. A la fin de l’été 1998, sur l’injonction de familles qui souhaitaient identifier des corps susceptibles d’avoir un lien de parenté avec eux, le corps de cet enfant est exhumé. C’est une famille suédoise qui démarchait pour cet enfant, les Pålsson. Ils pensaient que le petit pouvait être Gösta Leonard Pålsson, âgé de 2 ans et trois mois, et demi au moment de la catastrophe. A l’exhumation, 3 dents (55, 73, 84) seulement de l’enfant ont pu être retrouvées. Après analyse et comparaison des ADN mitochondriaux de la famille et des restes, il a été établi qu’il n’y avait aucun lien de filiation. Après étude, il a été reconnu que ces 3 dents étaient des dents temporaires. Une analyse anatomique dentaire appropriée a démontré que ces dents étaient celles d’un bébé dont l’âge se situait dans une fourchette de 9 à 15 mois, pas davantage. Par la suite, une étude microscopique et histologique a retrouvé de la dentine dans la dent lactéale n° 84, mais pas dans les deux autres. Au laboratoire des ADN anciens de l’université Brigham Young de l’Utah, dans le Colorado, de l’ADN mitochondrial a été isolé à partir de cette dentine. Cet ADN mitochondrial provenant de nos mères, des généalogistes sont parvenus à retrouver des descendants des lignées maternelles de tous les enfants de moins de 3 ans décédés dans le naufrage et à en obtenir des échantillons d’ADN. Deux garçons correspondaient au profil génétique prédéterminé : l’un avait 19 mois et le second, 13 mois. Comparés à leurs ancêtres maternels, les résultats ont été les mêmes pour les deux « suspects ». Mais, c’est le second qui correspondait aux critères d’âge estimés (9 à 15 mois). Il s’appelait Eino Viljam Panula. Ses restes ont été de nouveau inhumés. Il avait 13 mois [TITLEY, PYNN, CHERNECKY, MAYHALL, KULKARNI & RUFFMAN, 2004]. 

 

Copernic (1473-1543), célèbre astronome, a démontré notamment que l'ensemble des planètes tourne comme le fait la Terre autour du Soleil, l'axe de la terre oscillant comme ferait une toupie. Il a été enterré dans l'imposante cathédrale de Frombork, aux bords de la Vistule, mais personne ne savait exactement où.

En 2005, les recherches archéologiques effectuées sur de nouvelles bases explorent cette fois, l'autel Sainte-Croix, un des seize autels adossés aux piliers de la cathédrale. Sous le pavement de marbre, les restes de 13 corps ont été retrouvés, dont le crâne et les dents d'un homme septuagénaire. Une équipe de spécialistes venus de l'Institut médico-légal de Cracovie et de l'université suédoise d’Uppsala ont pu identifier les derniers restes comme étant ceux de Copernic. L'enquête avait été menée selon les procédés les plus modernes de la police judiciaire.

Les tests génétiques ont été pratiqués sur le matériel dentaire, mais la preuve qu'il s'agissait bien de l'ADN de Copernic faisait défaut.

Le matériel précieux, en l’occurrence un cheveu, a finalement été trouvé en Suède, dans un livre daté de 1518, intitulé Calendarium Romanum Magnum de Johannes Stoeffler, un manuel que Copernic avait utilisé pendant sa vie et qui avait été emporté par les Suédois au cours des guerres polono-suédoises du XVIIème siècle. La comparaison de l’ADN dentaire et de celui du cheveu a abouti à l’identification certaine des restes du célèbre astronome. Le 22 mai 2010, le corps de Nicolas Copernic a enfin pu être enterré solennellement à la cathédrale de Frombork, 467 ans après sa mort [FABRE, 2010].

 

Empoisonnement

Le cas de Diane de Poitiers (v. 1499/1500-1566), maîtresse de Henri II, fils de François Ier et roi de France, est bien évidemment incontournable.

La duchesse d’Etampes (v. 1508-ap. 1575), maîtresse en titre de François Ier, devenue rivale de Diane de Poitiers, « a fait versifier par un poète à sa dévotion un portrait caricatural de son ennemie. Dans celui-ci, rien n’avait été omis : ni les rides, ni les cheveux teints, ni les fausses dents [BORDONOVE, 2007], … »

La duchesse d’Etampes affublait sa rivale du triste sobriquet : « vieille édentée », en rapport avec ses fausses dents. Effectivement, elle a chargé un poète satirique, Jean Voûté, de railler Diane, alors âgée de 38 ans. Auteur d’une publication calomnieuse, dans ses hendécasyllabes, imprimées à Paris en 1537, il lui reproche ses dents artificielles [DESGARDINS, 1909]. Ambroise Paré décrit d’ailleurs l’appareil prothétique de Diane de Poitiers dans son livre « Dix livres de chirurgie, avec le Magasin des instrumens nécessaires à icelle » paru chez Jean Le Royer, en 1564, à Paris [CHARLIER, GEORGES, HUYNH-CHARLIER, CARLIER & POUPON, 2009].

En 2008, au pied de l’église d’Anet, les restes de Diane de Poitiers ont été exhumés. Ainsi, une mandibule édentée intacte, un hémi-maxillaire gauche et une dent ont été recueillis. Les ossements ont été superposés avec le dernier portrait peint de la favorite d’Henri II par Clouet en 1562, conservé au Musée de Chantilly. Le résultat est conforme aux traits du visage [CHARLIER, HUYNH-CHARLIER & CARLIER, 2009]. La dent, quant à elle, a fait l’objet de prélèvements ADN qui ont révélé un taux d’or considérablement plus important que la norme. L’or potable sous forme de solution buvable aurait été utilisé comme élixir de longue vie et de beauté par Diane. Cet or l’aurait lentement intoxiqué et tué [HOFSTEIN, 2009].

De plus, pour information, « La mandibule présentait des logettes alvéolaires pour les dents n° 31, 32 et 42 qui étaient absentes. Toutes les autres dents sont tombées en ante mortem depuis assez de temps pour que l’os ait parfaitement cicatrisé et que les branches horizontales soient amincies au point de donner un aspect sénile à la mandibule. L’hémi-maxillaire gauche portait encore la dent n° 24 qui affichait une usure occlusale marquée et une parodontopathie prononcée [CHARLIER, GEORGES, HUYNH-CHARLIER, CARLIER & POUPON, 2009]»

 

Bactériémie suite à une épidémie

En décembre 1812, la Grande Armée fait retraite sur Vilnius. En automne 2001, une fosse commune contenant des ossements de soldats français par centaine y est exhumée. Les recherches sont confiées au CNRS. Cette équipe a commencé par les fouilles du site, l’étude anthropologique et l’analyse des uniformes. Les prélèvements de terre, de tissus et de dents ont été remis à l’Unité des Rickettsies et pathogènes émergents du CNRS. Les scientifiques sont parvenus à séparer les poux des prélèvements par une technique de leur invention. 5 catégories de poux ont pu être ainsi repérés. Dans 3 d’entre elles, la bactérie Bartonella quintana, vecteur de la maladie du typhus, a été isolée. A suivi l’étude des dents de 35 soldats à partir de la pulpe dentaire. Cette pulpe présente sous forme de poudre, après étude ADN, a permis de déterminer l’existence de bactéries ayant contaminé leur hôte : Bartonella quintana dans 7 corps et Rickettsia prowazekii dans 3 autres. Autrement dit, après examens, 30% des soldats enterrés à Vilnius souffraient des maladies causées par les poux et en seraient morts. Ces insectes, vecteurs de la maladie du typhus, ont donc joué un rôle prépondérant dans la retraite de Russie [RAOULT, 2001-2010]. Cette pathologie a été la première cause de mortalité durant cette campagne. Elle a été responsable de 80 % des morts par maladies. D’après Oleg Sokolov, 300 000 hommes seraient morts lors de la campagne de Russie. Cinq hommes sont morts suite à une maladie pour un au cours des combats [RIAUD, 2010].

 

La fouille du cimetière protestant de Saint-Maurice du XVIIe siècle en 2005, menée sous la direction de l’INRAP et en collaboration avec le laboratoire départemental d’Archéologie du Val-de-Marne a mis en évidence plus de 165 inhumations ainsi que les vestiges du premier temple. Les premières analyses paléopathologiques montrent les symptômes d’un rachitisme vitamino-résistant sur une grande partie de la population inhumée ainsi que la présence de la peste chez trois individus. L’identification du bacille pesteux a été faite sur deux individus de sexe masculin et féminin provenant de la nécropole, le troisième a été reconnu sur une inhumation momifiée, retrouvé en 1986 dans un sarcophage en plomb. L’inhumé concerne un noble anglais, Thomas Craven, protestant et membre de l’église réformée parisienne, mort en 1636 à l’âge de 18 ans. Les analyses biomoléculaires ont été réalisées par le laboratoire des Rickettsies de la faculté de Médecine de Marseille. Les prélèvements dentaires ont concerné sept sépultures, incluant la momie du noble anglais Thomas Craven et six sépultures prises au hasard. Deux gènes dont la séquence est spécifique de la bactérie responsable de la peste, Yersinia pestis, ont été amplifiés par la technique PCR en présence de témoins négatifs. Au total, 3 individus ont un diagnostic de certitude de peste, et un autre, un diagnostic probable. La momie de Thomas Craven est ainsi le premier individu pestiféré identifié [HADJOUIS, VU, ABOUDHARAM, DRANCOURT & ANDRIEUX, 2006].

 

Filiation

Fils du prince héritier Frédéric III et de son épouse Victoria, princesse royale du Royaume-Uni, Guillaume II (1859-1941) revendique malgré tout son ascendance prussienne et conteste la suprématie maritime du Royaume-Uni. Il devient empereur en 1888. Son règne est marqué par un militarisme exacerbé. Il renvoie le chancelier Bismarck en 1890 et ne renouvelle pas le pacte germano-russe d’assistance mutuelle. Sa politique étrangère agressive le met en confrontation directe avec le Royaume-Uni et l’isole sur un plan diplomatique. Il n’a pas provoqué la Première Guerre mondiale à lui seul, mais n’a rien fait pour l’empêcher. Pendant la guerre, il est commandant en chef des armées, mais bientôt, il perd toute autorité, ce qui le discrédite. Chassé du pouvoir, son abdication est prononcée le 9 novembre 1918. Il s’exile au Pays-Bas. Il meurt à Doorn, dans sa propriété, pendant l’occupation allemande des Pays-Bas et est enterré dans cette ville [HTTP://FR.WIKIPEDIA.ORG, 2010].

Aujourd’hui, le château de Doorn est ouvert aux visites. Lorsque le guide arrive à la chambre où l’empereur est décédé, il prend dans la table de nuit, un petit écrin contenant une dent. En la montrant au public, il explique que c’est grâce à celle-ci que l’existence d’une fille illégitime de Guillaume II a pu être écartée [LAMENDIN, 2002].

En effet, une artiste peintre, dont les toiles étaient exposées dans une galerie d’art, arguait de sa soi-disant ascendance impériale. En 1996, un prélèvement ADN est effectué sur les restes de la dame en question. Il est comparé à celui du monarque allemand, obtenu à partir de la dent présentée par le guide. La conclusion est sans équivoque. Il n’y aucun lien de filiation. La supercherie est terminée [LAMENDIN, 2002 ; RIAUD, 2007].

 

Chronobiologie

En août 2008, Richard Green de l'institut Max-Planck d'anthropologie évolutive de Leipzig a réussi le premier séquençage de la totalité de l’ADN mitochondrial d’un Homo neanderthalensis, vieux de 38 000 ans. Les résultats confirment que le dernier ancêtre commun des Hommes de Néandertal et des Homo sapiens aurait vécu, il y a 660 000 ans (à 140 000 ans près). Svante Pääbo, également de l’institut Max Planck, a, quant à lui, commencé en 1997, son œuvre de déchiffrage avec la première analyse de l’ADN mitochondrial de Néandertalien. L’équipe internationale de chercheurs dirigée par Svante Pääbo a déchiffré une séquence d'environ un million de nucléotides de l’homme de Neandertal, grâce une nouvelle technique appelée le pyrosequencing, qui permet d’analyser les séquences d’ADN sans les amplifier. L’équipe d’Edward Rubin, qui a travaillé avec le même matériel en partenariat avec Pääbo, a utilisé une autre méthode et a identifié 65 000 paires de bases. Les deux analyses parviennent à des conclusions très proches relatives à la chronologie. Pour l’équipe de Pääbo, les Homo sapienset lesHomo neanderthalensisont divergé, il y a environ 500 000 ans, tandis que l’équipe de Rubin conclut que les deux espèces auraient partagé un ancêtre commun, il y a environ 700 000 ans et qu’elles se seraient par la suite séparées, il y a environ 370 000 ans. La différence entre les deux génomes serait inférieure à 0,5%. Rubin et ses collègues n’ont pas trouvé de traces d’un croisement entre l’homme moderne et l’homme de Néandertal [DEFRANCE, 2008]. Les résultats, publiés par l’équipe de Pääbo en 2010, portant sur l'analyse de 4 milliards de paires de bases d'ADN nucléaire issus d'ossements fossiles de trois Néandertaliens, montrent que ceux-ci partagent plus de caractéristiques génétiques avec les Homo sapiens modernes eurasiatiques qu'avec ceux d'Afrique sub-saharienne. Actuellement, les chercheurs envisagent l'hypothèse selon laquelle les Néandertaliens auraient contribué au génome des populations d'humains modernes non africaines. Selon eux, il y aurait un peu de Neandertal dans chacun de nous [GREEN, 2010]. 

 

Aujourd’hui, l’emploi de l’ADN en tant que moyen utilisé dans une recherche scientifique consécutive à une enquête historique ou archéologique est devenu un procédé incontournable. A l’exception de l’estimation de l’âge où les résultats, notamment d’études japonaises, ne semblent pas probants et où de nombreuses questions restent posées, ses champs d’investigations sont quasi illimités, pourvu que l’ADN soit intact et exploitable au vu des vestiges anciens retrouvés sur les sites. Pourtant, s’il est remarquable, ce procédé n’en demeure pas moins un recours extrêmement onéreux.

 

suite :


 

Dernier article original complet - vendredi 22 février 2013 et samedi 23 février 2013  (suite et fin) :

  

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Xavier RIAUD, "Apport de l'étude de l'ADN et de la structure minérale d'une dent en archéologie et en odontologie médico-légale à travers quelques cas historiques", Première partie, dans Histoire de la médecine en Egypte ancienne, Cherbourg, 22 février 2013.

 

  

Deuxième partie : article original du 23 février 2013

 

 

APPORT DE L’ETUDE DE L’ADN ET DE LA STRUCTURE MINERALE D’UNE DENT EN ARCHEOLOGIE ET EN ODONTOLOGIE MEDICO-LEGALE A TRAVERS QUELQUES CAS HISTORIQUES

INPUTS ON THE STUDY OF DENTAL DNA AND DENTAL MINERAL STRUCTURE IN ARCHAELOGY AND FORENSIC DENTISTRY THROUGH HISTORICAL CASES 

par

 Xavier RIAUD

 

—   Deuxième partie   —

 

La structure minérale

 

Si l’ADN est une source d’informations essentielles dans l’étude archéologique et la compréhension de l’histoire, d’autres éléments de l’organe dentaire appartenant à sa structure minérale, et en particulier les isotopes, apportent des renseignements considérables. Quels sont-ils ?

 

Température corporelle

Le California Institute of Technology, plus communément appelé Caltech, est parvenu, à partir d’isotopes en provenance de dents de dinosaures, à déterminer leur température corporelle aussi précisément que si elle avait été recueillie avec un thermomètre rectal. Ainsi, le brachiosaure aurait eu une température de 38,2 ºC et le camarasaure, de 35,7 ºC [LEWINO, 2011, p. 30].

 

Origine géographique

Le H. L. Hunley est un sous-marin confédéré coulé en 1864, au cours du blocus de Charleston, pendant la Guerre de Sécession. Le premier à avoir détruit un navire adverse lors de son unique sortie. Il était piloté par 8 servants tous morts pendant le naufrage. Ce vaisseau a été renfloué en 2000. Après l’étude des vestiges, est venue l’investigation médico-légale et plus spécifiquement, l’identification de ses hommes d’équipage. L’analyse isotopique des dents a eu pour objectif de définir la provenance de chacun de ces marins [HENAFF-MADEC, 2009].

Comme le précise Rozenn Hénaff-Madec, « la dent se forme selon une chronologie connue. L’émail en formation fixe des éléments comme le carbone, l’oxygène, l’azote et le strontium sous formes isotopiques différentes. Ce sont l’eau et les aliments qui apportent ces constituants. Ainsi, selon l’origine géographique et le régime alimentaire, les isotopes sont présents à des concentrations différentes.

Ce sont les travaux de Hall (1967) sur la concentration en 13C (isotope lourd, mais stable du carbone 12C) dans le maïs, puis ceux de Smith et Epstein (1971) sur les différents types de photosynthèse C3 et C4, et enfin, ceux majeurs, de De Niro et Epstein (1978-1981) qui démontrent que les rapports isotopiques du carbone 13C/12C et de l’azote 15N/14N sont intimement liés au régime alimentaire. Ces études marquent le début de l’utilisation des isotopes stables en archéologie et en paléoanthropologie [HENAFF-MADEC, 2009, pp. 55-58]. »

La même auteur ajoute : « Le collagène ne constitue pas le seul support des analyses isotopiques. La fraction minérale des os et des dents (carbonate et phosphate) est aussi le siège d’analyses. En effet, cette fraction minérale reflète l’alimentation dans sa totalité, au contraire du collagène qui ne signe que la présence des protéines. La fraction minérale contient également des isotopes d’oxygène 18O et de strontium 87Sr, éléments liés au contexte géographique [HENAFF-MADEC, 2009, pp. 55-58]. »

En conclusion de son étude, la jeune femme affirme que : « Dans le cas des échantillons prélevés au niveau des molaires des hommes du Hunley, il apparaît que pour quatre d'entre eux, les résultats des analyses montrent un régime à base de blé, de seigle et d'orge, et cela, dès la petite enfance. Ces hommes seraient donc nés en Europe. Parmi ces quatre personnes, deux d’entre eux vivaient aux Etats-Unis depuis relativement longtemps, car les analyses isotopiques réalisées au niveau de leurs fémurs montrent des résultats très proches de ceux qui sont nés et qui vivaient alors en Amérique du Nord. Dans les quatre autres cas, les marins ont grandi en ayant une alimentation basée sur le maïs et sur d’autres plantes du même groupe. Ce type de régime étant celui de base des Américains de cette époque, ils seraient donc nés dans le nouveau monde [HENAFF-MADEC, 2009, pp. 55-58]. »

En 2011, une fosse a été exhumée dans le Dorset où étaient enterrés de nombreux corps de Vikings (54 corps et 51 crânes). Ils avaient été tués par les Britanniques locaux. Après examen, les incisives centrales de ces hommes ont été limées. Les chercheurs supposent que ces mutilations tribales avaient pour but d’effrayer leurs ennemis. Toujours est-il qu’après examens isotopiques de ces fameuses dents, leur origine a été confirmée. Il a même été constaté que l’un de ces cadavres provenait du nord du cercle arctique [KENNEDY, 2011].

 

Déterminisme de l’âge 

Il existe plusieurs formules pour déterminer l’âge d’un corps à partir des dents. Il y a celle de Gustafson (1947) qui utilise six critères de modifications physiologiques des dents observés en fonction du vieillissement, mais qui impose de procéder à des inclusions et à la réalisation de lames minces, par sections polies, ce qui  n’est pas à la portée de tous. Il y a aussi celle de Lamendin (1988) qui propose, dans un premier temps, une formule de Gustafson simplifiée qui ne repose que sur trois critères et que le Français juge peu fiable. Puis, ce dernier définit une méthode ne s’appuyant que sur deux critères et prenant en compte les rapports entre la hauteur de translucidité, et la hauteur de parodontose (hors pathologie évidente) avec la hauteur de la racine. C’est la formule de Lamendin (1990). En 1989, Drusini s’intéresse à la translucidité de la dentine radiculaire sur dents entières [LAMENDIN, 2006, pp. 130-131 & RIAUD, 2008, p. 76]. Hélène Martin (1996) a, quant à elle, cherché une méthode de détermination de l’âge à partir du cément dentaire. Il y a le nuancier radiculaire de Guy Collet (1999). Ce dernier a étudié la couleur des racines des dents à différents âges et sur différents échantillons de population. A partir des résultats, il a créé un nuancier qui fait référence aujourd’hui [LAMENDIN, 2006, pp. 130-131 & RIAUD, 2008, p. 76].

En 1976 et en 1977, à des fins de réhabilitation de la momie de Ramsès II (1314-1213 av. J.-C.), pharaon égyptien, elle séjourne 8 mois au musée de l’Homme à Paris. Là, elle subit tous les examens médico-légaux possibles. Les dents ne sont pas oubliées. La détermination de l'âge vraisemblablement par la méthode de Gustafson aboutit à un âge de décès à 80 ans, plus ou moins cinq ans [MONIER, 2006, pp. 151-157].

En novembre-décembre 1995, lors de la translation du corps de sainte Roseline (v. 1270-1329), des examens médico-légaux sont réalisés. C’est le Dr Franck Domart qui s’occupe de la partie odontologique. Il renonce à utiliser la formule de Lamendin, car il lui faudrait extraire des dents. Il décide d’utiliser, pour déterminer l’âge de la relique, la méthode de Drusini. Avec celle-ci, il estime l’âge de sainte Roseline à 41,5 ans avec une marge d’erreur de plus ou moins 10 ans. Puis, il emploie la méthode de Gustafson simplifiée. Avec cette dernière, Franck Domart situe l’âge du corps dans une fourchette comprise entre 50 et 60 ans, avec une marge d’erreur à plus ou moins 10 % [GREVIN, BOYER & AL., 2006].

 

Régime alimentaire

L’Australopithecus afarensis (4 100 000 ans à 3 000 000 années) présente une mandibule en forme de V rétréci vers l’avant. Les dents ont des particularités communes aux dents actuelles. Malgré tout, elles en diffèrent par certains caractères de spécialisation. L’exemple le plus connu, popularisé sous le nom de Lucy, vient de l’Afar, au nord de l’Ethiopie. Ses molaires et les prémolaires sont de grande taille. Les incisives sont développées et les canines, saillantes. Le palais est peu profond. Les mandibules sont extrêmement robustes. Les mâchoires sont projetées vers l’avant [HEIM & GRANAT, 2001, pp. 10-37 ; PICQ, 1999]. L’usure des dents raconte ce que mangeait l’Australopithecus afarensis. La robustesse des os des mandibules et des dents suggère que son alimentation comportait une part importante de nourritures végétales coriaces. L’étude des traces d’usure apporte plus de précisions sur la nature de ce régime alimentaire. La consommation de feuilles a laissé des traces de polissage sur les incisives. Les nourritures provenant du sous-sol et contenant des éléments abrasifs, comme des grains de poussière ou de roche, ont provoqué la formation de petits cratères dans l’émail des molaires. À étudier ses dents, on sait donc que les australopithèques de l’Afar consommaient abondamment les parties souterraines des plantes (racines, bulbes, tubercules, rhizomes, oignons), comme d’autres aliments coriaces tels que les légumes et les fruits des arbustes des savanes. Toutes ces nourritures sont plus dures que celles qui sont trouvées dans les milieux forestiers humides, ce qui explique la face robuste de Lucy et des siens.

L’Homo neandertalensis, quant à lui, évolue entre 100 000 ans et 30 000 ans, en Europe et au Moyen Orient. La face des Néandertaliens ramenée vers l’avant forme le « museau néandertalien ». Celui-ci se présente sous la forme d’un plan oblique et régulier, qui s’étend du bord du nez à l’arcade zygomatique. Les pommettes ont complètement disparu. L’avancée des arcades dentaires est telle que, vu de profil, un espace, dénommé espace rétromolaire, sépare la dernière molaire de la branche montante de la mandibule. Ce sont des carnivores [PICQ, 1999].

 

Profession

Une étude macroscopique et une étude en microscopie électronique à balayage de deux prémolaires inférieures humaines chez un individu du Néolithique moyen ont permis de mettre en évidence une usure particulière, non physiologique, due à l'utilisation de ces dents comme outil. A l'aide des exemples préhistoriques déjà connus et des exemples ethno-archéologiques, une hypothèse a pu être avancée quant à l'activité artisanale de cet individu. Il aurait exercé la fonction de crocheur [GILBERT, 1999, pp. 31-59].

En mars 2008, la momie d'une femme d'époque copte, conservée dans les collections du musée des Beaux-Arts de Grenoble, a subi une étude tomodensitométrique dans la clinique universitaire de radiologie de l’Hôpital A. Michallon [RIAUD & JANOT, 2010, pp. 89-97]. Selon Francis Janot, « (…) Les surfaces coronaires du groupe incisif supérieur (11, 12, 21, 22) de cette femme sont porteuses d'une rainure, de direction mésio-distale, qui est une perte de substance parfaitement indépendante de toute mastication. Elle débute de l’incisive latérale supérieure gauche (22) pour se terminer au point de contact distal de l’incisive latérale supérieure droite. En vue palatine, les surfaces de contact d’aspect polymorphe sont très marquées selon la dent. La dentine, qui est mise largement à nu, porte un schéma de mastication consécutif à des frottements répétitifs sur une substance dure introduite transversalement dans la bouche. De fait, l’objet inséré n’a épargné qu’un modeste pan d’émail vestibulaire et palatin de la couronne de l’incisive supérieure gauche. De plus, des stries parallèles, de direction horizontale, les unes au-dessus des autres, sont identifiées sur la face vestibulaire de la canine gauche. Manifestement, elles sont dues aux insertions répétées du même objet. Les indices d'anatomie dentaire relevés restituent un mouvement d’interposition d’un objet entre les dents qui commence du côté gauche de la denture (à partir de la 22). La face vestibulaire de la canine (23) fait alors fonction de guide. Ainsi, il est possible d’affirmer que cette femme était à prédominance gauchère [RIAUD & JANOT, 2010, pp. 89-97]. » Le même auteur affirme que : « Effectué des milliers de fois, le mouvement fonctionnel est donc sans aucun doute en relation directe avec la profession exercée par la défunte. Il est donc possible de proposer une reconstitution de la gestuelle accomplie. Ainsi, les usures polymorphes identifiées sur le groupe incisif supérieur sont provoquées par un mouvement fonctionnel mandibulaire d’avant en arrière qui fait pendant au mouvement manuel oscillatoire de la main gauche qui travaille également à un mouvement de tirage de dedans en dehors pour obtenir une dilacération des fibres de la racine. La face vestibulaire de la 23 fait alors office de calage, tandis que la couronne de la 22 sert de guide de positionnement. De plus, l’usure maximale des surfaces occlusales du groupe incisif droit (11,12) est consécutive à l’activité musculaire massétérine due aux multiples forces exercées lors de la dilacération des fibres. Cette activité des faisceaux musculaires a modelé la face externe de la branche montante droite de la mandibule et entraîné une contrainte maximale sur la zone osseuse de l’insertion inférieure du muscle au niveau de l’angle mandibulaire. L'exostose (ou enthèse) observée sur l’angle goniaque droit en est la conséquence directe. Elle est la réponse osseuse à cette contrainte répétée tout au long de l’activité professionnelle de la défunte de Grenoble. Naturellement, l’ensemble du mouvement réalisé induit une salivation abondante [RIAUD & JANOT, 2010, pp. 89-97]. »

Enfin, Francis Janot est convaincu que : « Plusieurs hypothèses sont  envisageables : une activité musicale, un travail de vannerie et de cordes, un travail de tissage, de cuir ainsi que les troubles de bruxomanie. Malheureusement, aucune des marques induites sur la denture par ces différentes activités ne correspond à celles relevées sur la défunte de Grenoble. Pourtant, cette marque odonto-légale possède un parallèle dans la statuaire africaine. En effet, le mouvement d’interposition d’une racine est reconnu sur des statuettes en bois de chefs et de devins des ethnies kôngo/vili et kôngo/yombé de la république démocratique du Congo. Par un mouvement de dilacération des fibres de la racine-munkwisa, le jus extrait a des vertus hallucinogènes qui exacerbent les pouvoirs de clairvoyance et de vision. Les études pharmacologiques montrent que l'écorce de cet arbuste contient un puissant alcaloïde : l'ibogaïne qui stimule le système nerveux central. Selon la dose ingérée, il entraîne des hallucinations, des tremblements, voire des convulsions. (…) Dès lors, l'Égyptienne ancienne du muséum de Grenoble pourrait être porteuse, sur son organe dentaire, d’une marque révélatrice d'une activité de clairvoyance [RIAUD & JANOT, 2010, pp. 89-97]. »  

 

En conclusion, il me semble bon de rappeler que la dent est imputrescible et, à ce titre, constitue un outil médico-légal extraordinaire, une source d’informations qui, si elle est bien exploitée, peut se révéler quasiment intarissable.

 

Bibliographie

 

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Article original complet - du vendredi 08 février 2013 :

Toutankhamon

Xavier RIAUD,  "Reconstruction crânio-faciale de Toutânkhamon (1345 -1327 av. J.-C.)", dans Histoire de la médecine en Egypte ancienne, Cherbourg, 8 février 2013.

 

 

Reconstruction crânio-faciale de Toutânkhamon

(1345 -1327 av. J.-C.)

par

Xavier Riaud*

 

Il est le onzième pharaon de la XVIIIème dynastie (Nouvel Empire). Il est peut-être le fils d'Akhénaton et de sa seconde épouse, Kiya. Sa date de début de règne est l'objet de controverses parmi les égyptologues. Il est situé aux alentours de -1336 / -1335 à - 1327.

En l'an - 1338, Akhénaton meurt d'une éprouvante maladie. Lui succède une reine du nom de Änkh-Khéperourê, reconnue aujourd'hui comme la sœur ainée de Toutânkhamon, Mérytaton[1]. Elle disparaît rapidement pour des raisons inconnues. Toutânkhaton monte alors sur le trône de la Haute et de la Basse Égypte, bien qu'il ne soit encore qu'un enfant de neuf ans. Il est légitimé en épousant Ânkhésenpaaton, née à la fin de l’an VII d'Akhénaton, la troisième fille de Néfertiti et d'Amenhotep, qui devient ainsi son épouse royale sous le nom de Ânkhésenpaamon.

Trop jeune pour régner, c'est le divin père Aÿ et le général Horemheb qui détiennent le véritable pouvoir administratif et militaire. La contre-réforme est puissamment amorcée. Sous l'influence des prêtres et thuriféraires de l'ancienne religion, qui le manipulent, l'enfant-pharaon renoue avec les traditions et prend le nom de Toutânkhamon, signe d'Amon, le dieu excommunié rétabli, tandis que son épouse devient Ânkhésenpaamon.

Le culte amonien est restauré. Le jeune roi quitte Akhetaton pour retourner à Thèbes, puis à Memphis, qui redevient la capitale de l'empire.

Toutânkhamon établit la restauration des temples endommagés sous l'épisode amarnien et se fait ériger un nouveau temple à l'ouest de Thèbes. Il n'a pas le temps de se faire construire sa demeure d'éternité, puisqu’il disparaît brusquement en - 1327, à l’âge de dix-huit ans. Sans héritier, la lignée Ahmosis disparaît avec lui. Il est enseveli à la hâte dans une petite tombe qui n'avait pas été construite pour lui. La tombe initialement prévue pour lui allait devenir celle de son successeur Aÿ[2].

Lorsque, le 4 novembre 1922, l'archéologue britannique Howard Carter découvre la sépulture de Toutânkhamon et ses incroyables richesses, il offre à un jeune souverain, au règne bien effacé, l'occasion unique d'entrer dans l'histoire.

Le 5 janvier 2005, la momie de Toutânkhamon est déplacée de sa tombe située dans la Vallée des Rois, pour la première fois en 80 ans[3]. Avec beaucoup de précautions, le corps est passé au CT-Scan[4]. En quinze minutes, ce dernier produit 1 700 images[5]. Celles-ci sont étudiées pendant près de deux mois par une équipe égyptienne de scientifiques, puis par une autre composée d’experts originaires de Suisse et d’Italie.

Le 8 mars 2005, Farouk Hosni, ministre de la Culture, annonce que l’équipe égyptienne a terminé ses examens scanners de la momie du jeune pharaon[6]. Le Dr Zahi Hawass, responsable de l’équipe scientifique égyptienne, atteste que rien ne prouve que Toutânkhamon ait été tué[7].

Ce jeune roi serait mort à l’âge de 19 ans. Les scientifiques sont absolument incapables d’expliquer la forme allongée du crâne qui est de type dolichocéphale. Les sutures crâniales sont fermées correctement. Aucune anomalie n’est décelable.

Sa dentition est bonne et ne présente pas de problème particulier. Ses dents de sagesse ne sont pas complètement sorties. L’une d’entre elles est incluse. Les dents du bas ne sont pas alignées et leur recouvrement par celles du haut est important (= overbite). Les incisives centrales supérieures sont larges, ce qui constitue avec le recouvrement important des dents inférieures, un signe caractéristique retrouvé chez les autres rois de la même famille[8].

Enfin, les chercheurs ont découvert dans la bouche du défunt pharaon, une légère fente palatine.

 

Image 1

Scanner de la denture de Toutânkhamon[9].

 

Le 10 mai 2005, le Dr Zahi Hawass[10] présente au public les résultats de trois équipes internationales qui ont tenté chacune, une reconstruction faciale du visage de Toutânkhamon. Deux de ces formations étaient sponsorisées par la National Geographic Society et la troisième par le Supreme Council of Antiquities. Les Français et les Egyptiens savaient qu’ils travaillaient sur la face du jeune pharaon, mais les Américains l’ignoraient.

Les Américains et les Français ont produit à Paris, un modèle en plastique du crâne. Pendant ce temps, les Egyptiens agissaient de même en fabriquant leur propre modèle à partir des clichés scanners et grâce à un logiciel adapté à cet effet.

Très vite, les Français et les Américains ont conclu que le crâne était de type caucasien. Les Américains qui travaillaient en aveugle, ont compris rapidement que le sujet était originaire d’Afrique du nord[11].

Se concentrant sur la typologie raciale, les équipes n’ont pas hésité à ajouter l’argile nécessaire sur les modèles plastiques qu’ils ont utilisés par la suite comme guide pour reconstituer les traits du jeune roi. Une fois ceci accompli, le sculpteur français a réalisé un moulage en silicone sur lequel il a ajouté les yeux, les cheveux et la couleur à la peau, et aux lèvres.

Le résultat final des trois équipes est très proche sur de nombreux détails du visage de Toutânkhamon. Le seul point où les trois reconstructions divergent est la forme du nez.

 

Image 2

Reconstruction crânio-faciale de Toutânkhamon effectuée par l’équipe égyptienne[12].

 

Le dimanche 4 novembre 2007, ce roi vieux de 3 300 ans a offert son visage en exposition au public de Louxor pour la première fois, parfaitement protégé par une vitre en plexiglas[13].

Moustafa Wazary, directeur de la Vallée des Rois, déclare : « Ce que vous allez voir est un très beau visage (…) C’est un beau garçon avec un joli sourire et des dents proéminentes[14]»

 


(*) Docteur en chirurgie dentaire, Docteur en épistémologie, histoire des sciences et des techniques, Lauréat et membre associé national de l’Académie nationale de chirurgie dentaire, membre libre de l’Académie nationale de chirurgie.

[1] Cf. fr.wikipedia.org, Toutânkhamon, 2008, pp. 1-7.

[2] Cf. fr.wikipedia.org, Toutânkhamon, 2008, pp. 1-7.

La tombe se trouve dans la Vallée des Rois et porte le nom KV62.

[3] Cf. http://guardians.net/hawass/Press release Tutankhamun CT Scan, 8 mars 2005, pp. 1-5.

[4] Le CT-Scan est une technique non invasive, rapide, qui peut différencier les tissus superficiels et les os dans les trois dimensions de l’espace.

[5] Les consultants étrangers étaient composés d’un pathologiste légiste travaillant à l’Archeological Museum du Tyrol du sud, d’un radiologiste provenant du General Hospital de Bolzano, en Italie et d’un paléopathologiste-anatomiste évoluant à l’Université de Zurich.

[6] Cf. http://guardians.net/hawass/Press release Tutankhamun CT Scan, 8 mars 2005, pp. 1-5.

[7] Cette équipe égyptienne placée sous la haute autorité du Dr Zahi Hawass, était composée d’un professeur en médecine légale, d’un autre en anatomie et de trois autres en radiologie. Le CT-Scan avait été offert au préalable par l’entreprise allemande Siemens et la National Geographic Society au Supreme Council of Antiquities basée au Caire en Egypte, dont Hawass est l’administrateur.

[8] Cf. http://guardians.net/hawass/Press release Tutankhamun CT Scan, 8 mars 2005, pp. 1-5.

[9] Cf. The Supreme Council of Antiquities, Egyptian Mummy Project, Dr Zahi Hawass, director, Cairo, Egypt, 2008, © The SCA.

[10] Cf. http://guardians.net/hawass/Press Release, Tutankhamun Facial Reconstruction, 10 mai 2005, pp. 1-3.

[11] Cf. http://guardians.net/hawass/Press Release, Tutankhamun Facial Reconstruction, 10 mai 2005, pp. 1-3.

[12] Cf. The Supreme Council of Antiquities, Egyptian Mummy Project, Dr Zahi Hawass, director, Cairo, Egypt, 2008, © The SCA.

[13] Cf. eternelle-egypte.over-blog.com, Toutânkhamon : son « vrai » visage dévoilé au public, 2007, pp. 1-3.

[14] Cf. www.lefigaro.frToutânkhamon dévoile son visage 3 300 ans après sa mort, 07/11/2007, p. 1. 

 


Article original complet - du jeudi 07 février 2013 : 

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Xavier RIAUD, "Datation de l’âge sur la momie de Ramsès II (1314 - 1213 av. J.-C.)", dans Histoire de la médecine en Egypte ancienne, Cherbourg, 7 février 2013.

 

Datation de l’âge sur la momie de Ramsès II

(1314 - 1213 av. J.-C.)

par

Xavier Riaud*

 

« Troisième pharaon de la XIXème dynastie, fils de Séthi I, Ramsès II est le pharaon le plus connu de l'antiquité égyptienne. Ce grand bâtisseur qui a fait construire de nombreux temples et palais dont les inscriptions murales ont vanté ses louanges et ses glorieux faits d'armes, a régné près de 67 ans sur le Royaume des Deux Terres.

Né vers 1314 av. J.-C., Ramsès II a grandi aux côtés de Séthi I avant de lui succéder vers 1279 av. J.-C.. Le règne de ce grand pharaon est remarquable tant par sa durée que par la personnalité du roi et par la richesse de l'Egypte à cette époque. Entouré de conseillers compétents, Ramsès II laisse le souvenir d'un guerrier invincible et d'un amant comblé par la beauté de son épouse la plus connue: Néfertari. Les 67 années de son règne ont été agrémentées d'une période de paix et de prospérité que l'Egypte n’a plus jamais retrouvé[1]. » (…) 

« Le 19ème jour du premier mois de la saison akhet de l'année 1213 avant J.-C., Ramsès II s'est éteint probablement dans sa capitale de l'est du delta: Pi-Ramsès. Son corps momifié sur place a été ensuite transporté jusqu'à Thèbes par le Nil et il a été déposé dans son magnifique tombeau creusé dans la falaise de Deir-el-Bahari, (repéré aujourd'hui comme le n° 7 de la Vallée des Rois), après les rituels funéraires d’usage.

Deux cents ans plus tard, alors que la dynastie des Ramsès disparaissait, une période de troubles a commencé. Tandis qu'une nouvelle dynastie émergeait dans le delta à Tanis, à Thèbes, les Grands Prêtres d'Amon prenaient le pouvoir et devaient faire face aux révoltes, aux invasions libyennes et aux pillages des tombeaux de la Vallée des Rois. La tombe de Ramsès II a été violée et sa momie, profanée par des pilleurs à la recherche des bijoux en or. Constatant cela, le Grand Prêtre Herihor a décidé de restaurer les bandelettes de nombreuses momies royales et les a regroupé dans les tombes de Sethi I et d’Aménophis II[2]. »

« Ramsès II a été déposé dans la tombe de son père, mais peu après de nouveaux pillages ont dégradé la momie davantage. En l’an X, le Grand Prêtre Pinedjem I a réparé les dégâts occasionnés sur la momie.

La sépulture étant jugée trop exposée, les prêtres d'Amon ont décidé de transférer les momies royales dans la tombe de la reine Inhâpi lors des obsèques en ce lieu du Grand Prêtre Pinedjem, le 17ème jour du règne de Siamon, en  - 979 av. J.-C.

Ramsès II allait enfin pouvoir reposer en paix pendant 2830 années[3]. »

« En 1974, le Docteur Maurice Bucaille alerte les autorités égyptiennes sur l'état pitoyable de la momie de Ramsès II. Les liens diplomatiques entre les gouvernements égyptiens et français aboutissent alors à la décision de confier la momie à la France afin de la faire traiter et examiner. Le 26 septembre 1976, la momie de Ramsès II arrive au Bourget où elle est réceptionnée avec les honneurs dignes d'un chef d'Etat. Puis, elle gagne le Musée de l'Homme où elle demeure 8 mois. Une cinquantaine de spécialistes de toutes les disciplines se penchent sur la momie, ses tissus et son sarcophage qui sont minutieusement étudiés. L'ensemble est radiostérilisé aux rayons gamma à la centrale nucléaire de Saclay.

Le 10 mai 1977, Ramsès II rejoint sa terre natale[4]... » (…)

« L'état dentaire (du pharaon) est très mauvais. Une abrasion des tables occlusales, la réduction de certaines dents à l'état de racines (n° 16, 26 et 37) et la présence de lésions périapicales sur 46 sont perceptibles. L'absence des incisives et canines maxillaires sauf la 11 et la 13, l'absence des molaires et prémolaires (36, 47, 18, 28, 25, 24 et 15) sont également visibles. Une alvéolyse (= perte de substance osseuse) généralisée touche l'ensemble de la denture. Aucune trace de traitement dentaire ou de restauration prothétique n’est relevée.

La détermination de l'âge par la méthode Gustafson[5] donne un âge de décès à 80 ans plus ou moins cinq ans[6]. » (…)

 

Image 1

Radiographie de profil du crâne de Ramsès II[7].

 

Image 2

Agrandissement de la radiographie de profil de Ramsès II[8].

 



(*) Docteur en chirurgie dentaire, Docteur en épistémologie, histoire des sciences et des techniques, Lauréat et membre associé national de l’Académie nationale de chirurgie dentaire, membre libre de l’Académie nationale de chirurgie.

[1] Cf. Monier Thibault, « Retour sur l’étude paléopathologique de la momie de Ramsès II au Muséum d’Histoire Naturelle (Paris) : 1976-1977 », in Actes du 1er Colloque Internationale de Pathographie 2005, De Boccard (éd.), Paris, 2006, pp. 151-157 (également cf. Lalouette Claire, Dieux et pharaons de l’Egypte ancienne, Librio (éd.), Paris, 2004, pp. 68-70).

[2] Cf. Monier Thibault & Agnès, « La momie de Ramsès II : étude paléopathologique d’un pharaon de la XXèmedynastie », in Actes de la Société française d’histoire de l’art dentaire, Paris, 2002, pp. 1-6.

[3] Cf. Monier Thibault & Rombauts Agnès, Pathologie et thérapeutique dentaires dans l’Egypte pharaonique, paléopathologie de momies égyptiennes, Thèse Doct. Chir. Dent., Paris, 1982, pp. 102-123.

[4] Cf. Monier Thibault & Agnès, « La momie de Ramsès II : étude paléopathologique d’un pharaon de la XXèmedynastie », in Actes de la SFHAD, Paris, 2002, pp. 1-6.

D’après Monier (1982), des études similaires ont été réalisées sur d’autres momies royales :

-        Thoutmosis II règne de -1493 à -1490. Il serait mort à l’âge de 25 ou 30 ans.

-        Amenophis IV Akhenaton (-1364 à -1347) avait plus de 20 ans à sa mort, mais moins de 25 (méthode de Gustafson).

-        Sethi Ier (-1304 à -1290) devait approximer les 40 ans au moment de son décès.

-        Mineptah (-1224 à -1204) devait avoir plus de 60 ans (70 à 75 en fait) lorsqu’il meurt (Cf. Monier Thibault & Rombauts Agnès, Pathologie et thérapeutique dentaires dans l’Egypte pharaonique,… ,  op. cit., 1982).

[5] Il existe plusieurs formules pour déterminer l’âge d’un corps à partir des dents. Il y a celle de Gustafson (1947) qui utilise six critères de modifications physiologiques des dents observés en fonction du vieillissement, mais qui impose de procéder à des inclusions, et à la réalisation de lames minces, par sections polies, ce qui  n’est pas à la portée de tous. Il y a aussi celle de Lamendin (1988) qui propose une formule de Gustafson simplifiée qui ne repose que sur trois critères et que le Français juge peu fiable. Puis, ce dernier définit une méthode ne s’appuyant que sur deux critères et prenant en compte les rapports entre la hauteur de translucidité et la hauteur de parodontose (hors pathologie évidente) avec la hauteur de la racine. C’est la formule de Lamendin.

En 1989, Drusini s’intéresse à la translucidité de la dentine radiculaire sur dents entières.

Hélène Martin (1996) a, quant à elle, cherché une méthode de détermination de l’âge à partir du cément dentaire.

Il y a le nuancier radiculaire du Dr Guy Collet (1999). Ce dernier a étudié la couleur des racines des dents à différents âges et sur différents échantillons de population. A partir des résultats, il a créé un nuancier qui fait référence aujourd’hui.

Des chercheurs japonais auraient déterminé un procédé d’estimation de l’âge à partir de l’étude de l’ADN tiré de la pulpe dentaire (Cf. Lamendin Henri, Petites histoires de l’art dentaire d’hier et d’aujourd’hui, L’Harmattan (éd.), Collection Ethique médicale, Paris, 2006,  pp. 130-131).

[6] Cf. Monier Thibault, « Retour sur l’étude paléopathologique de la momie de Ramsès II au Muséum d’Histoire Naturelle (Paris) : 1976-1977 », in Actes du 1er Colloque Internationale de Pathographie 2005, De Boccard (éd.), Paris, 2006, pp. 151-157.

[7] Cf. Faure Clément, collection privée, communication personnelle, Paris, 2007, © Pr Clément Faure.

[8] Cf. Faure Clément, collection privée, communication personnelle, Paris, 2007, © Pr Clément Faure.

 


Article original complet - du mercredi 06 février 2013 :

1- Hatchepsout(RMO_Leiden)

Xavier RIAUD,  " Identification dentaire de la reine égyptienne Hatchepsout ", dans Histoire de la médecine en Egypte ancienne, Cherbourg, 6 février 2013.

Identification dentaire de la reine égyptienne Hatchepsout

par

Xavier Riaud*

 

Qui est-elle ?

 

En 1479 av. J.-C., Thoutmosis II meurt après un règne très court (Maruéjol, 2007). Son successeur, Thoutmosis III, n’est pas le fils de la grande épouse royale, Hatchepsout (reine-pharaon, est la cinquième à régner dans la XVIIIème dynastie de l’Egypte antique (fr.wikipedia.org, 2008), demi-sœur du défunt, mais celui d’une épouse secondaire. La reine décide de se proclamer « roi » à part entière. Ainsi, s’installe une corégence avec le jeune roi. En tant que co-régente, elle se présente en tant que grande épouse royale et épouse du dieu Amon. Ses décisions sont prises au nom du roi régnant, Thoutmosis III. En l’an 7 du règne du jeune monarque, la reine coiffe les couronnes royales et adopte les attributs de la royauté : titulature composée de cinq titres et de cinq noms, sceptres, barbe postiche, pagne court et queue de taureau, qui sont autant de symboles de puissance. Très vite, elle proclame qu’elle est la fille d’Amon-Rê, le chef du panthéon égyptien, qui l’aurait choisie pour lui succéder (Maruéjol, 2007). Elle affirme aussi que son père l’aurait aussi confirmée dans sa succession devant les grands du royaume réunis. Hatchepsout s’assied sur le trône aux côtés de Thoutmosis III, mais n’entend pas le remplacer. En effet, si deux rois existent, une seule fonction royale demeure. La reine forme le jeune roi à assumer sa charge future. Ce dernier devient d’ailleurs un remarquable chef de guerre. Grande bâtisseuse, les dernières attestations de cette reine remontent à l’an 20. A sa mort, Thoutmosis III organise ses funérailles. Rien ne change dans la gouvernance en place. Toutefois, en l’an 42-43, le roi ordonne l’effacement de toutes les images la représentant dans les temples. Son nom disparaît aussi. Le prêtre Manéthon (IIIème siècle av. J.-C.) rapporte qu’elle a régné pendant vingt-deux ans. Elle s’est distinguée par son intelligence subtile et sa volonté de fer (Maruéjol, 2007).

 

A la recherche d’Hatchepsout…

 

Son tombeau, situé dans la Vallée des Rois, près de Thèbes, est exploré en 1903, par Howard Carter (1874-1939), égyptologue britannique, qui a découvert également la tombe de Toutankhamon. Ce lieu de sépulcre est baptisé KV20. Il est retrouvé vide (Battaggion, 2007). Jusqu’à aujourd’hui, le corps demeurait introuvable. Zahi Hawass, directeur du Conseil supérieur des antiquités égyptiennes, mène une enquête scientifico-policière à travers tout le pays pour retrouver la momie de la souveraine (Hawass (a) et (b), 2007). Il part à la recherche des momies exhumées, mais la tâche est ardue. Cachées et déplacées par les grands prêtres afin que les pilleurs ne mettent pas la main dessus, les dépouilles royales sont très nombreuses en Egypte. C’est pourquoi Hawass a fondé l’Egyptian Mummy Project qui consiste à étudier les momies au CT-Scan (Technique d’imagerie qui recompose un corps scanné en 3D) (Riaud, 2008).

 

L’enquête commence

 

Accompagné d’une équipe de chercheurs, il entame son investigation en visitant une petite tombe située en face de la KV20. Elle s’appelle la KV60. Cette sépulture découverte par Carter en 1903, contenait deux momies de la XVIIIème dynastie : une petite, identifiée comme

 

(*) Docteur en Chirurgie Dentaire, Docteur en Epistémologie, Histoire des Sciences et des Techniques, Lauréat et membre associé national de l’Académie Nationale de Chirurgie Dentaire.

étant celle de la nourrice royale, Sitre-In, et une obèse reposant à même le sol (Hawass (a) et (b), 2007).

Après avoir dégagé l’entrée, Zahi se retrouve face à une caisse en bois rudimentaire qui ne renferme que la dépouille de la femme obèse. En constatant son port altier, son bras gauche replié sur la poitrine à la manière d’une momie royale, il est convaincu de l’ascendance monarchique de ce corps. Il décide aussitôt de la déplacer jusqu’au musée du Caire pour l’étudier en détail.

Quant à la momie de la nourrice, elle est déjà au musée de la capitale égyptienne. Hawass considère qu’elle pourrait être une candidate intéressante (Battaggion, 2007).

Une fois saisis ces deux cadavres, l’équipe se remémore l’existence de deux autres momies royales non identifiées, retrouvées dans une cache du temple de Deir el-Bahari (DB320). L’endroit, fouillé au XIXème siècle par le département d’Antiquités égyptiennes, cachait plus d’une douzaine de momies de pharaons issues de plusieurs dynasties dont Ahmôsis I, Thoutmosis II et III, et Ramsès II (Hawass (a) et (b), 2007).

 

Etude comparative

 

Parmi celles-ci, les deux dépouilles baptisées Unknown woman A et Unknown woman B(Femme inconnue A et Femme inconnue B) étaient accompagnées d’un vase scellé et frappé du nom d’Hatchepsout (Hawass (a), 2007).

Après avoir été entreposés dans le musée du Caire lors de leur exhumation, les deux corps avaient été oubliés et délaissés dans les sombres et poussiéreux couloirs. De nombreuses heures s’écoulent avant que les deux femmes ne soient finalement retrouvées.

La confrontation entre les quatre momies devient possible. 

Une reconstitution en 3D de chaque momie est réalisée par le docteur Ashraf Selim, radiologue, et le docteur Hany Abdel Rahman Amer. Chaque portrait scanné est comparé au portrait recomposé selon les données récupérées sur les dépouilles de Thoutmosis I, II et III. Une conclusion s’impose aussitôt. Les corps du site DB320 sont écartés (Hawass (b), 2007).

Pour confirmer les liens de parenté entre les deux autres momies et la lignée des Thoutmosis, les experts effectuent des analyses ADN. Des échantillons sont prélevés sur la hanche et le fémur des momies, et sont comparés à ceux de la grand-mère d’Hatchepsout, Ahmès Néfertari. Les résultats mettent des mois à leur parvenir (Battaggion, 2007).

L’enquête n’avance plus. Laquelle de la femme obèse ou de la nourrice pourrait être la défunte reine ?

 

Une reine qui n’avait pas toutes ses dents…

 

C’est alors que Zahi Hawass se rappelle du vase funéraire portant le cachet de la reine.

L’urne est passée au scanner. Parmi les organes embaumés, rien d’extraordinaire n’est relevé, si ce n’est le fragment d’une molaire (Hawass (b), 2007). Or, l’une des deux momies a une mauvaise dentition (Battaggion, 2007).

Après examen, l’un des deux corps présente une très mauvaise dentition. Le professeur Galal el-Beheri, professeur d’orthodontie à la Faculté dentaire du Caire, est aussitôt sollicité. Le dentiste procède à l’étude des scanners du visage, compare les dents et le fragment, et finalement arrive à la certitude que le morceau trouvé dans le vase de la cache DB320 appartient bien à une molaire de la mâchoire de la dame obèse du tombeau KV60. Le rapport citerait un morceau de dent large de 1,6 cm pour un espace de 1,7 cm (Hawass (b), 2007).

 

Hatchepsout est identifiée. Elle serait morte alors qu’elle avait environ 50 ans.

Cette découverte est officiellement annoncée le 27 juin 2007.

 

Image 1

Scanner de la femme obèse du tombeau KV60 identifiée comme étant la reine Hatchepsout qui révèle

l’absenced’une molaire, mais la persistance de sa racine,

© The Supreme Council of Antiquities.

  

 

Image 2

Une molaire sans racine a été trouvée dans le coffre contenant le foie d’Hatchepsout

qui est passé au scanner,

© The Supreme Council of Antiquities.

 

Références bibliographiques :

 

Battaggion Victor, « La momie qui n’avait pas toutes ses dents », in Historia, n° 729, septembre 2007, pp. 30-31.

fr.wikipedia.org, Hatchepsout, 2008, pp. 1-6.

(a) Hawass Zahi, « The search for Hatshepsout and the discovery of her mummy », in http://www.guardians..net, juin 2007, pp. 1-7.

(b) Hawass Zahi, « Identifying Hatshepsut’s mummy », in http://www.guardians.net, juillet 2007, pp. 1-9.  

Maruéjol Florence, « Thoutmosis III et Hatchepsout : un trône pour deux », in Historia, n° 729, septembre 2007, pp. 24-29.

Riaud Xavier, Quand la dent mène l’enquête…, L’Harmattan (éd.), Collection Médecine à travers les siècles, Paris, 2008.

The Supreme Council of Antiquities, Egyptian Mummy Project, Dr Zahi Hawass, director, Cairo, Egypt, 2008.

 

Avec tous mes remerciements au Dr Zahi Hawass pour son aide précieuse.

 

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