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Histoire de la médecine en Egypte ancienne

PNEUMOLOGIE - II

Plusieurs articles à suivre - février 2014 :

PNEUMOLOGIE - deuxième partie : ANATOMIE

 

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  • Richard-Alain JEAN, « Notes complémentaires sur le système respiratoire en Égypte ancienne (1) Anatomie », dans Histoire de la médecine en Égypte ancienne, Cherbourg, 21 février 2014.

 

 


 

 

 

 

 

 

NOTES COMPLÉMENTAIRES

SUR LE SYSTÈME RESPIRATOIRE

EN ÉGYPTE ANCIENNE (1)

ANATOMIE

 

 

Richard-Alain JEAN

 

 

 

           Je tenais, pour les praticiens et toutes les personnes intéressées, à compléter mon article sur la respiration en Égypte ancienne qui vient juste d’être publié dans l’excellente revue « Pharaon Magazine » [1], en ajoutant ici quelques éléments d’ordres anatomiques, physiologiques et physiopathologiques importants, puis, à les illustrer par quelques figures et tableaux qui n’avaient pas pu être reproduits.

            Ce premier article complémentaire traitera donc de l’anatomie. Il fournira des éléments morphologiques supplémentaires pris sur des modèles humains et animaux [2].

 

1) Les voies aériennes supérieures

 

           Le nez et la bouche. – Situés sur la face et servant beaucoup à la respiration, le nez avec les narines et la bouche font partie des « sept trous de la tête (b3b3w 7 m ḏ3ḏ3) des suivants de Rê et des adorateurs de Thot » (pEbers 763. 90, 17-18).

 

NB

Les éléments déjà indiqués dans Pharaon Magazine ne sont pas repris dans cet article : cfR.-A. Jean, « La médecine Égyptienne (3) : Le système respiratoire », Pharaon Magazine, 16, Janvier 2014, p. 47-50.

 

 


 

 

2

 

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            Le nez. – Le « nez » (fn), avec le « bout du nez » (tp n fn), sa pointe (nt), se continue par la« narine » (šrt) qui termine « l’aile du nez » (g3bt nt šrt) séparée de son homologue par le cartilage septal, lui-même prolongé par le vomer, et formant la cloison nasale nommée « colonne du nez » (jwn n fn). L’os nasal ou « chambre du nez » (štyt nt fn) s’insère par la « racine du nez » (tp ḥry n fn) dans « l’écaille frontale » (p3qt nt ḏnnt).

           Les fosses nasales. – Les « fosses nasales » sont désignées par le terme msdty. Elles sont figurées en externe par le signe D19 et en situation semi-ouverte par le signe D20 qui peut sous-entendre le rhinopharynx et un accès à l’oropharynx situé plus bas et qui s’ouvre dans la cavité buccale limitée en avant par les arcades dentaires supérieure et inférieure puis l’ouverture de la bouche avec les lèvres (fig. 2).

           Il faut rappeler que la lame criblée de l’éthmoïde formant le plafond des fosses nasales est effondrée par l’opérateur afin d’extraire le cerveau au moment de la momification.

 

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           Le larynx. – La partie supérieurs du larynx (ʿšʿšt ) avec les cordes vocales doit pouvoir se nommer ḥ3ʿʿ pour des raisons cliniques évidentes ( ʿ pharyngale redoublé sonore). 

           Les traits verticaux parfois représentés peuvent refléter la complexité des éléments cartilagineux et de l’os hyoïde appartenant au larynx et s’articulant entre eux.

           Le larynx en haut avec la trachée en bas à sa suite peuvent être faciles à deviner dans la statuaire, ainsi que parfois l’arête médiane de l’angle du cartilage thyroïde qui forme la « pomme d’Adam ».

 

 

 


 

 

3

 

           Chez l’homme (fig. 3), voir par exemple les détails de la face latérale du cou d’un buste en calcaire peint (Louvre, N 2289), la statue de Nakht-hor-heb (Louvre, A 94 - N95) [3], le haut d’une statue d’un inconnu (Louvre, E 25374 ?) [4], un tête de Sésostris III (BM 66.99.5) … avec une saillie bien visible formée dans l’axe par le larynx. Ce détail paraît encore plus marqué au niveau de la partie antéro-supérieure du cou d’une tête en diorite d’Aménophis III (Louvre, A25 - N 25) [5]. Chez la femme, bien que moins perceptibles, ces reliefs anatomiques peuvent également être finement évoqués (fig. 4 et 5). Voir dans ce sens le buste de la reine Néfertiti où le « cou lisse et gracieux » présente bien cette particularité (Berlin, ÄM 21300) [6].

 

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4

 

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1) Les voies aériennes inférieures

 

         Le cou lui-même (wsr.t) est très anciennement désigné par le mot défini par une tête et un cou de canidé (cf. infra). La dénomination de sa partie antérieure s’oppose normalement à celle de sa partie postérieure avec la locution « ‘un cou’, ce qui fait sept vertèbres ». Au niveau de la partie antérieure du cou se trouvent la gorge puis le gosier (ḫḫ), avec des mots parfois équivalents. Ces termes font partie d’un certain nombre de dénominations anatomiques se rapportant toutes à un des passages internes du cou, ou à une projection superficielle ce qui explique qu’ils désignent le plus souvent une partie aérienne, parfois simplement traduite par « gorge ». Cependant, ces mots peuvent être synonymes. En effet, le « gosier », qui est, lui, une partie interne, forme une sorte d’entonnoir se terminant en bas avec la « voie » aérienne inférieure en avant, et la « voie » digestive en arrière.

           La trachée. – Le signe F11 (phon. ḫḫ) représente une tête de bovin avec son cou. Le signe F12 (phon. wsr.t) montre une tête de canidé également avec son cou : il s’agit de sa première forme. Ces hiéroglyphes se déclinent ensuite avec des extrémités inférieures se terminant en fourche molle évoquant pour beaucoup la partie basse d’une manche de sceptre (S40 droit, ou, S41 sinusoïdale). Il faut ici rappeler que les branches de ligneux s’écartent souvent en une forme de « V » fermé franc à angle aigu rigide. Ceci est bien visible dans la nature et dans les représentations des différents autres bâtons de repos ou autres (poteaux, étais, fourches). Ils sont figurés comme à l’extrémité des signes correspondants (O30 et U116). Or, tandis que les longs sceptres apparentés à des bâtons (avec hampes dérivées de bâtons de bergers) [7] pouvaient donc êtres fourchus à cette extrémité de façon naturelle ou non [8] et revêtir une forme animale de prestige en haut, il se pourrait bien que les signes F11, F12 et dérivés (F66, F87 …) représentent initialement, soit un cou plein comportant la trachée et les vaisseaux sectionnés vides pour les signes F11 et F12, puis, simplement une trachée molle et relâchée – avec à son extrémité distale les deux bronches souches droite et gauche – et dépassant de la base de la tête pour F11A et F10, ou d’un cou plus large (F12A).

           En effet, nous savons que la systole trachéale est dépendante de l’état de la bande musculaire postérieure qui se retrouve molle après la mort et qui lui donne dans ce cas un aspect très relâché dans sa partie inférieure, c’est-à-dire à la division des bronches souches droite et gauche qui adoptent alors une forme nettement moins aiguë (fig. 9) [9] – ce phénomène est encore accentué chez les bovins.

 

 


 

 

5

 

           Une barre horizontale pourrait aussi signaler symboliquement de gros vaisseaux présents ou se chevauchant à cet endroit (F10).

           Les signes F10, F11 et F11A sont bien des déterminatifs du cou, de la gorge ou indiquant des actions de la gorge [10].

           Nous verrons que la trachée-artère « plonge » littéralement dans le bloc pulmonaire (cf. infra).

 

Fig

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           Dans beaucoup de bas-reliefs et parmi des offrandes disposées sur une table, ou encore simplement posées à côté de la dépouille, voire aussi rentrant dans la composition du signe F1 (fig. 12), il est possible de distinguer la trachée dépassant nettement de la tête du bovin (fig. 10-11-12 ) (Temple de Louxor, musée en plein air de Karnak, tombe de Mérérouka [11] ).

           Les anneaux cartilagineux des trachées de bœufs découvertes lors des dépeçages rituels sont parfois bien dessinés dans les scènes de boucherie peintes dans les tombeaux (fig. 15, 16, 24, 25). Voir encore dans le mastaba de Ti à Saqqarah [12].

 

 


 

 

6

 

            Je reparlerai de ces parties cartilagineuses humaines particulières dans mon prochain article consacré à la suite de la physiologie respiratoire, puis, dans celui, complémentaire, où je développerai davantage la physiopathologie.

 

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   7

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           8

      

3) Le tronc

 

           La ceinture scapulaire et la cage thoracique étaient bien connues des Égyptiens (cf. mon premier texte). Éléments anatomiques auxquels il faut ajouter la musculature respiratoire utile (muscles principaux et accessoires).

           La ceinture scapulaire. – En avant, les insertions basses des deux sterno-cléiodo-mastoïdiens peuvent être bien indiquées ainsi que le creux de la fourchette sternale accompagnée latéralement des deux reliefs des têtes claviculaires, du corps de la clavicule avec la grande fosse supraclaviculaire (salière) au-dessus (fig. 19, 20, 21). On peut également noter sur le buste de la reine Néfertiti (fig. 4, 5) la petite dépression située entre le chef sternal et le chef claviculaire du sterno-cléïdo mastoïdien (petite fosse supraclaviculaire dite de Sedillot).

           Rappelons ici que les trois muscles scalènes s’insèrent en bas dans cette région intermédiaire (sur la première et la deuxième côte).

           La cage thoracique. – Le dessin du gril costal est bien rapporté [14] comme parfois la dépression sous-xiphoïdienne du sujet très maigre (Kestner-Museum, 1955.153) [15]. Le diaphragme était connu, sa disposition et son rôle séparateur des organes thoraciques et abdominaux étaient enseignés par les médecins aux embaumeurs. En effet, la coupole diaphragmatique est effondrée totalement ou partiellement par l’opérateur au moment de la momification afin d’extraire le bloc cœur-poumon. Cet espace ménagé sera a nouveau franchi pour remettre le cœur embaumé « en sa place ».

           Les muscles thoraciques. – Les muscles intercostaux figurent bien sur les pièces de boucherie. Les trapèzes et les pectoraux sont généralement bien représentés dans l’art, surtout chez le sujet masculin (fig. 20, 21).

 

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9

 

           L’abdomen. – Plusieurs muscles abdominaux jouent également un rôle dans la respiration. Ils sont suggérés dans la statuaire masculine de part et d’autre de la ligne blanche jusqu’aux flancs souvent individualisés (fig. 20, 21).

 

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           4) Les poumons

 

           Les organes intra-thoraciques sont situés au-dessus du « diaphragme », insérés comme comme nous l’avons vu sur le bord inférieur du thorax (fig. 18). La paroi supérieure du médiastin correspondant à l’orifice supérieur du thorax doit être signifiée par l’expression r3-jb « la bouche du cœur » haute. Situés dans les médiastins antérieur et moyen, les « viscères médiastinaux » sont composés des vestiges du « thymus » en avant et en haut, puis, des entrelacs des gros vaisseaux (mtw) et du cœur (ḥ3ty). Le cœur est, comme nous l’avons déjà vu, considéré par les textes médicaux comme ayant sa « place » normale « au centre du tractus pulmonaire ».

 

page 9 (© R[16]

         Durant la momification, les poumons sont prélevés, traités et déposés dans un vase canope dédié à la divinité protectrice Hâpy, l’un des quatre fils d’Horus, auquel ils sont assimilés du vivant même de leur propriétaire.

 

 


 

 

10 

 

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11 

 

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12

 

Fig 31 a (© R

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13

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[1] R.-A. Jean, « La médecine Égyptienne (3) : Le système respiratoire », Pharaon Magazine, 16, Janvier 2014, p. 47-50.

[2] Les éléments indiqués dans Pharaon Magazine ne sont pas repris dans cet article.

[3] Voir les clichés de face et de profil :

http://cartelfr.louvre.fr/cartelfr/visite?srv=car_not_frame&idNotice=2959&langue=fr ; et encore, dans O. Perdu, Les statues privées de la fin de l’Égypte pharaonique, Paris, 2012, n° 23, p. 272-281.

[4] O. Perdu, op. cit. 2012, n° 22, p. 45 et 260-265.

[5] Chr. Barbotin, Les statues du Nouvel Empire, Paris, 2007, n° 16, I, p. 58-61.

[6] Voir les clichés de face et de profil :

http://www.egyptian-museum-berlin.com/c53.php?sprache=de ; et encore, D. Wildung, M. Alte, Ägyptisches Museum, Berlin, 1989, n° 50, p. 96-97.

[7] H.G. Fischer, « Notes on Sticks and Staves in Ancient Egypt », MMJ, 13, 1979 (Supplément, vol. 12-13, MMA, New York, 1980), p. 5-32, et notamment p. 21-25.

[8] Cette forme aiguë pouvait être façonnée volontairement (cf. H.G. Fischer, op. cit. 1979, p. 15 et fig. 21).

[9] F. Lejars, Titres et travaux. Anatomie chirurgicale, Paris, 1892, p. 18 et fig. 8 et 9 p. 19. Voir aussi : F. Lejars, « La forme et le calibre physiologiques de la trachée », dans Revue de chirurgie, Avril 1891.

[10] P. Grandet, B. Mathieu, Cours d’égyptien hiéroglyphique, Paris, 1997, p. 682 ; M. Malaise, J. Winand, Grammaire raisonnée de l’égyptien classique, Liège, 1999, p. 706.

[11] Tombe de Mérérouka, Osiris.net, fig. nw-3-1, p. 6 (Chambre A13, Mur nord scène 3, en haut à droite) :

http://www.osirisnet.net/mastabas/mererouka/mereruka_06.htm.

[12] Voir aussi par exemple : H.G. Fischer, Ancient Egyptian Callligraphy, A Beginner’s Guide to Writing Hieroglyphs, New York, 1988, p. 25 (Ti II, pl. III) ; Chr. Ziegler, Catalogue des stèles, peintures et reliefs égyptiens de l’Ancien Empire et de la Première Période Intermédiaire, Paris, avec le linteau d’Izi, n° 9, p. 78-81.

[13] B. Kastler, A. Livolsi, P. Germain, E. Rodière, J.-F. Litzler, Y. Bernard, « IRM des cardiopathies congénitales », dans EMC, Cardiologie-Angéiologie, Volume 2, Issue 1, February 2005, Pages 27–72.

[14] Voir par exemple : A. Labrousse, A. Moussa, La chaussée du complexe funéraire du roi Ounas, Le Caire, 2002, p. 85-86, avec bibliographie, et, fig. 117-118 ; Catalogue de l’Exposition temporaire du Museum Vleeshuis, Anvers, 1996, Catalogue additionnel, Parcours chronologique, objet n° 64, p. 1.

[15] Chr.E. Loeben, dans D. von Recklinghausen, Ägyptische Mumien, Württemberg, 6 oct. 2007 - 24 mars 2008, Stuttgart, 2007, n° 52, p. 62-63.

[16] Ph. Collombert, Le tombeau de Mérérouka, Paléographie, Paléographie hiéroglyphique, 4, IFAO, Le Caire, 2010, § 94, p. 55.

 

z Note 17

 

[17 bis] Note 17 - (© R= note 18 de la fig. 31.

[18 bis] Les options lexicographiques de cette planche anatomique pédagogique ne font pas apparaître d’expressions synonymes afin de ne pas désorienter le lecteur mais elles seront disponibles dans le « Lexique récapitulatif » de la version imprimée des Cahiers Intégrés de Médecine Égyptienne (CIME), n° 2, 2014.

 

 

 


 

  

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